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Interdiction d’employer un proche comme assistant parlementaire : une réponse démagogique et inefficace à des abus inadmissibles.

Ces derniers temps, le grand public a découvert avec stupeur que certains parlementaires avaient employé leur épouse ou leurs enfants entant qu’assistants, et que certains de ces emplois seraient fictifs.

On a aussi découvert que d’autres parlementaires employaient ou avaient employé en tant qu’assistants des individus exerçant en fait des fonctions de permanent au sein de leur parti politique. Deuxième série de soupçons d’emplois fictifs.

 

Quel est le point commun entre ces deux abus ? la parentalité ou la non-réalité, la fiction de l’emploi ?

Pour éviter ces abus, que veulent proposer le ministre de la justice et le nouveau président ? Interdire l’emploi de proches (conjoint, concubin, enfant…) comme assistants parlementaires.

Réponse spectaculaire et démagogique, autant qu’injuste, potentiellement contournable et inefficace. Pourquoi ne pas carrément imposer le célibat aux parlementaires et leur interdire de procréer ou de prendre amants/maîtresses ? Ainsi, plus de risque de conflit de nature familiale.

Soyons sérieux. Ces abus proviennent depuis des décennies d’une situation de laxisme, de gabegie et d’incompétence que seul l’État peut s’autoriser, et qu’on ne rencontrerait jamais en entreprise.

La vie de parlementaire est exigeante et très exposée, nul ne le conteste. Un député ou un sénateur partage son temps entre les palais parisiens et sa circonscription / son département (qui souvent inclut la ville dont il est maire, mais dorénavant cela est terminé avec la fin du cumul des mandats). Lorsqu’il n’est pas élu d’Ile de France, cela signifie qu’il partage sa vie entre Paris et la Province. C’est le cas de nombreux travailleurs du privé mais ce n’est pas pour autant agréable. Donc au final, il est dommage de priver un parlementaire d’une possible collaboration avec son conjoint et d’introduire ainsi une discrimination au recrutement. Est-ce constitutionnel d’ailleurs, en regard des principes d’égalité et de droit au travail ?

Mais le fond du sujet n’est pas là. Parlementaire et assistants sont des travailleurs comme les autres et à ce titre :

  • D’une part ils doivent justifier leurs dépenses en en conservant les justificatifs, comme tout travailleur et tout chef d’entreprise.
  • D’autre part les emplois d’assistants doivent être encadrés, par une convention collective explicitant niveaux de compétences et de rémunérations, par un contrat de travail stipulant missions à remplir, salaire annuel, horaires à respecter etc.

Et enfin comme bon nombre de travailleurs dans les usines, les bureaux d’études, les agences bancaires, les services informatiques etc. l’assistant doit être assujetti à un encadrement du temps de travail. Cela peut se matérialiser par un reporting mensuel via un intranet ou par un système de badge informatisé permettant de tracer les entrées/sorties de l’assistant et d’attester ainsi mois après mois de sa présence, de la réalité du travail accompli et de la quantité d’heures ou de jours qui y a été consacrée. Fin de la fiction.

En résumé, laissons les parlementaires embaucher qui ils veulent comme assistants, mais donnons au système les moyens de tracer la réalité des emplois confiés.

 

 

Barémisation des indemnités pour licenciement abusif : une solution facile et injuste en réponse à un faux problème.

La perspective de dommages et intérêts importants accordés à un salarié licencié par le tribunal des prud’hommes constitue pour une TPE ou un PME un risque financier conséquent. Ce risque serait de nature à freiner l’embauche. Le prétexte invoqué par le gouvernement pour cette barémisation est une limitation de ce risque financier.

On en vient à traiter par cette barémisation l’ultime conséquence d’une séparation qui, si elle avait été correctement conduite, ne se serait pas dégradée à un tel point.

Que se passe-t-il dans la réalité ?

Prenons un cas usuel : Un collaborateur est installé dans son travail. Avec le temps parfois, et quelles qu’en soient les raisons, sa performance se dégrade, les dérives (retards, absences, manquements, négligences, incivilités, conflits …) deviennent de plus en plus fréquentes et la situation commence à se dégrader. Arrive le moment où le dirigeant décide que cela suffit et qu’il faut que cette personne quitte l’entreprise.

Faute de parvenir à s’accorder sur une séparation amiable via une rupture conventionnelle, le chef d’entreprise licencie alors son employé, plus ou moins adroitement et plus ou moins brutalement. L’exemple usuel est celui d’une faute, lourde ou grave, invoquée ou inventée pour procéder sans ménagement au licenciement.

Le salarié congédié décide ensuite d’attaquer son employeur aux prud’hommes pour licenciement abusif. Il arrive que les prud’hommes requalifient le licenciement « sans cause réelle et sérieuse » et accordent à l’employé une indemnisation compensatrice conséquente.

Bien sûr, il est des salariés qui profitent de leur situation et abusent d’un comportement inacceptable, mais ceux-là donnent suite en général à une proposition de rupture conventionnelle.

 

Est-il pour autant nécessaire de plafonner ces indemnités ?

La responsabilité d’une situation devenue délétère en revient à l’employeur. En effet lorsqu’on recrute un collaborateur, on s’engage à :

  • Lui fournir un travail
  • Lui verser un salaire
  • Le former

Mais ce n’est pas tout. Le devoir d’un employeur, c’est aussi de manager ses collaborateurs.

Et c’est souvent ici que le bât blesse. Prétextant un manque de temps, une charge opérationnelle élevée ou d’usuelles « tracasseries administratives », trop de petits patrons voire de prétendus « managers » … négligent le management.

Ou plus exactement, faute de repères ou de compétences, ils ne savent pas trop comment s’y prendre. La proximité et la convivialité, réelles en TPE-PME, occultent la nécessité d’un pilotage formel et régulier de tous les collaborateurs.

 

Comment organiser le pilotage des collaborateurs ?

En synthèse, un pilotage équilibré porte sur les performances autant que sur les compétences et les comportements, et alterne séquences collectives et temps individuels.

Parmi les séquences collectives, nous trouverons la traditionnelle réunion plénière de fin ou de début d’année, les réunions régulières de service (hebdomadaires, mensuelles ou bi/trimestrielles selon les contextes), et des réunions ponctuelles de lancement de nouvelles activités ou de gestion de crise…

Premier élément de pilotage : certains temps de ces séquences devront porter sur des éléments de cadrage réglementaire ou comportemental : horaires, port des EPI, respect de normes techniques, courtoisie etc.

Parmi les temps individuels figureront :

  • L’entretien professionnel (rendu obligatoire par la loi du 5 mars 2014), biennal ou en des circonstances précises (retour de maladie etc.),
  • L’entretien annuel d’évaluation, facultatif dans le cas général, obligatoire pour chaque salarié soumis au forfait-jours. Deuxième élément de pilotage : dans sa partie consacrée au passé, cet entretien doit impérativement porter non seulement sur les résultats mais aussi sur les écarts constatés entre ce qui était attendu et ce qui s’est passé. Troisième élément de pilotage, dans sa partie consacrée à l’année qui vient, cet entretien doit détailler de façon explicite les « exigences » de son manager, à savoir comment il contribue à la bonne marche des affaires et ce qui est attendu de lui en matière de comportement, d’évolution de compétences etc.
  • Des entretiens et autres points bilatéraux plus ou moins planifiés et réguliers.
  • Des entretiens non-planifiables résultant de nécessités de service (affectation à une nouvelle tâche, retour de formation …) ou de circonstances exceptionnelles (félicitations, recadrage, crise, conflit, « coup de mou » …)

C’est l’absence de ces deux derniers types d’entretien, la maladresse ou la négligence avec laquelle ils sont conduits, qui engendre les situations délétères évoquées plus haut et qui sont susceptibles de mener à un licenciement conflictuel, faute de savoir procéder autrement. C’est souvent le manque de compétence, ou le manque de courage, ou les deux, qui font qu’un entretien de recadrage n’est pas mené et qu’on laisse ainsi la situation s’envenimer.

 

Il manque dans cette palette un type d’entretien, un quatrième élément de pilotage, parfois appelé entretien séquentiel de pilotage. Pour faire simple, il s’agit d’un « mini entretien annuel », « plusieurs fois par an » ! Cet entretien peut se dérouler tous les 3 à 4 mois. Il est d’autant plus justifié que dans la conjoncture actuelle, circonstances économiques et priorités peuvent changer en un année. Cet entretien porte sur les travaux accomplis, les difficultés rencontrées, les résultats obtenus, les comportements affichés, les nouvelles priorités le cas échéant. Il doit faire l’objet d’un compte rendu écrit stipulant les points positifs et négatifs. Parmi ces derniers doivent figurer des alertes, recadrages ou avertissements constitutifs si nécessaire, le moment venu, d’un dossier de licenciement ainsi étayé en bonne et due forme. Un tel licenciement ne court quasiment aucun risque d’être requalifié comme abusif.

 

En conclusion, pour réduire le risque de dommages et intérêts en compensation d’un licenciement abusif, il faut avant tout éviter de créer des conditions abusives de licenciement. Pour cela il convient tout d’abord d’éviter que la situation se dégrade insidieusement, en identifiant les écarts et en exprimant d’éventuelles mises en garde par un pilotage précis et régulier des collaborateurs.

Qui plus est, un pilotage régulier ne peut qu’accroître le niveau de motivation et de performance des collaborateurs, ce qui ne peut être que bénéfique pour l’entreprise.

La mesure efficace et novatrice serait donc de rendre obligatoire l’entretien séquentiel de pilotage.

Il serait dommageable et contre-productif d’encourager un certain laxisme et de permettre à des entrepreneurs s’affranchir de leur devoir de management en instituant cette garantie d’une indemnisation plafonnée en cas de licenciement abusif.

NB : Dans ma vie professionnelle, j’ai toujours consacré un temps notoire à ce pilotage. J’ai eu à me séparer d’un certain nombre de salariés, sans jamais perdre aux prud’hommes.

Et qu’on ne vienne pas nous dire que mener de tels entretiens est chronophage, que c’est une tracasserie de plus ou que je ne sais quoi. Un patron, petit ou grand, un manager qui n’a pas le temps de passer une heure trois ou quatre fois par an avec chacun de ses n-1 ne mérite ni son poste, ni son statut. Qu’il redevienne alors simple salarié ou qu’il s’installe en indépendant.

Un CDI à flexibilité contrôlée

Instituer un Contrat à Durée Indéterminée à Flexibilité Contrôlée dont le sort, sur une période donnée (3 à 5 ans), serait lié à celui de la réalité des performances de l’individu et de l’entreprise, et à la réalisation de son projet multiannuel.

 

87% des emplois actuels sont sous CDI. En revanche 90 % des embauches se font sous forme de CDD, de plus en plus courts, ce qui montre bien les craintes qui entourent le CDI. L’incertitude concernant l’évolution du chiffre d’affaires de l’entreprise en est la cause. Ce besoin de souplesse face aux aléas du marché est légitime.

C’est pourquoi il nous semble utile d’aider les entreprises à « gérer » cette incertitude au niveau des contrats de travail eux-mêmes. Des expérimentations sociales pourraient être faites pour voir leurs effets sur la création d’emplois.

Par exemple, établir un contrat quasi-unique, à durée indéterminée et à flexibilité contrôlée permettrait de rompre avec notre système actuel qui oppose deux catégories de salariés, les CDI et les précaires. Le CDD resterait alors strictement réservé aux remplacements temporaires ou aux emplois saisonniers et intermittents. Les jeunes y seraient sensibles. D’autres  pistes de réflexion sont aussi sur la table : citons l’extension de l’actuel compte personnel d’activité à tous les droits sociaux acquis au cours de sa vie professionnelle. Cela pourrait favoriser les évolutions de carrières. Expérimentons quelques pistes et regardons leur effet sur l’emploi.

Un nouveau contrat de travail : le CDI à flexibilité contrôlée (CFC)

L’objectif est de concilier la sécurité dont a besoin chaque individu (2° niveau de base de la pyramide de Maslow), avec la flexibilité dont ont besoin les entreprises pour assurer leur pérennité.

Le principe est celui d’un contrat à durée indéterminée lié à des objectifs de performance collectifs et individuels régulièrement évalués sur la durée d’un projet global d’entité :

  • Contrat à durée indéterminé unique avec un modèle par branche (prop Badinter – LyonCaen)
  • Conclu dans le cadre d’hypothèses économiques et d’un Projet d’entreprise ou d’entité validé par les partenaires sociaux et enregistré auprès d’une autorité donnée
  • Obligatoirement piloté par la ligne hiérarchique opérationnelle
  • Interruptible selon rupture conventionnelle durant la durée du Projet (typiquement 3 ans) en fonction des performances réelles de l’individu et de l’entreprise
  • Automatiquement converti en CDI classique en fin de période convenue au Projet

Bénéfices collatéraux :

  • Ce CFC et sa phase préalable liée au projet d’entreprise dispense de fait du recours à de multiples CDD renouvelables, et allège d’autant la charge administrative de l’entreprise.
  • Un pilotage régulier des collaborateurs prévient le stress et le burnout, et accroit leurs chances de réussite.

Dans quel contexte appliquer ce nouveau CFC ?

Seules seraient éligibles au CFC les entreprises acceptant le dépôt de leur plan multiannuel et s’engageant, preuves à l’appui, à un pilotage traçable de leurs salariés, le tout sous confidentialité.

Le nouveau CFC s’appliquerait par essence aux nouveaux emplois d’investissement et aux nouveaux emplois de production. Reste à déterminer dans quelle mesure il pourrait également s’appliquer aux emplois de substitution mais a priori rien ne s’y oppose.

Reste également à évaluer si les dispositions de ce nouveau CDI pourraient s’appliquer rétroactivement aux emplois existants mais cela parait difficile dans la mesure où cela reviendrait à modifier unilatéralement les conditions d’un contrat de travail.

Il convient enfin de lier l’introduction de ce nouveau contrat au contexte de flex-sécurité que les pouvoirs publics cherchent à mettre en place depuis des années. A mi-chemin entre une politique purement libérale et un politique arc-boutée sur les situations acquises, une troisième voie se dessine via une politique de répartition dans laquelle la puissance publique incite et finance la croissance d’effectifs, la formation professionnelle, les investissements, les reconversions et les relocalisations des entreprises. Ce financement serait assuré par des ressources fiscales et mis en œuvre sous forme de prêts ou de subventions accordées par les Régions et par BPIFrance.

30 propositions pour les TPE-PME #LoiTravail

Le GSE (Groupe Socialiste d’Entreprise) TPE-PME rassemble des militants socialistes, entrepreneurs ou salariés de TPE & de PME et formule régulièrement des avis et propositions.

Une TPE ou une PME n’embauche que lorsque son niveau d’activité le justifie. Rappelons que 75 % des salariés de notre pays travaillent dans des entreprises de moins de 200 personnes. La baisse du chômage passe donc d’abord par le soutien de l’activité des TPE / PME.

Bon nombre d’observateurs et de chefs d’entreprise, dont nous sommes, soulignent que l’embauche en TPE-PME dépend avant tout du carnet de commandes, puis de la volonté effective des entrepreneurs de développer et de faire croître leurs sociétés et seulement ensuite du contexte législatif et fiscal.

L’enjeu est donc là, et la bataille contre le chômage se situe dans ces entreprises. Les TPE et les PME souffrent de 3 causes majeures de déséquilibre :

  1. Une demande atone, des cycles commerciaux qui s’allongent et qui se complexifient, des clauses contractuelles de plus en plus contraignantes,
  2. Des ressources humaines sur le fil du rasoir, surchargées, contraintes d’effectuer des tâches relevant d’une qualification moindre faute de personnel qualifié en place ; cela se combine avec une difficulté à recruter des ressources spécialisées alors même que des fonds ont été levés.
  3. Des finances fragiles, des fonds propres insuffisamment élevés et une trésorerie affaiblie par des délais de paiements encore trop longs.

D’où les propositions que nous formulons  et qui sont issues :

  • Du Livre Blanc publié par le GSE TPE PME en 2015,
  • De considérations nouvelles faisant suite aux annonces de janvier 2016 (plan d’urgence pour l’emploi) et de février 2016 (avant-projet de loi travail),
  • D’échanges permanents et informels avec des entrepreneurs,
  • D’auditions menées par le GSE TPE PME durant l’année 2015, ayant porté sur les opportunités et perspectives d’implantation ou de réimplantation d’activités industrielles sur le territoire français.

Leur synthèse est téléchargeable en cliquant sur ce lien.

Leur détail est disponible dans le cadre d’entretiens de présentations plus approfondies.

Au moins 250 000 emplois nouveaux possibles en octroyant un abattement immédiat de cotisations ASSEDIC pour l’embauche de chômeurs seniors longue durée dans des emplois d’investissement en TPE, PME ou ETI

Proposition : Octroyer un abattement immédiat de cotisations ASSEDIC pour l’embauche de chômeurs seniors longue durée dans des emplois d’investissement en TPE, PME ou ETI

 

Il s’agit de mobiliser la trésorerie des PME et ETI en priorité vers le financement de nouveaux emplois réservés à des seniors chômeurs de longue durée. Pour toute embauche en CDI affecté à un emploi d’investissement (contribuant au développement économique de l’entreprise et créateur à terme d’emplois de production), ne relevant pas du CIR/CII, d’un chômeur de plus de 6 mois âgé de 45 ans ou plus, alors l’entreprise bénéficie pendant 18 mois d’un abattement applicable à la totalité des cotisations Assedic, et égal à la masse salariale des emplois créés.

Cette mesure permet la création potentielle immédiate de 250 000 emplois dans les PME et ETI et bien plus si les TPE jouent également le jeu.

Préambule

Très schématiquement on peut distinguer 3 facteurs de création d’emploi :

  • Substitution: Il s’agit de pourvoir à un emploi devenu vacant suite au départ, volontaire ou non, d’un collaborateur.  Ce remplacement peut être direct, poste pour poste, ou indirect, le poste vacant étant pourvu par promotion interne créant en cascade un emploi moins qualifié.
  • Production: il s’agit d’emplois créés pour satisfaire directement les exigences de la production ou de son support. En réponse à un accroissement de l’activité ou à une nécessité réglementaire, ce sont des emplois permanents ou saisonniers, directement productifs (opérateurs de centre d’appels, ouvriers, vendeurs, logisticiens, serveurs) ou des emplois en support de la production : administration des ventes, ressources humaines, services financiers et administratifs, maîtrise, supervision, management de proximité…
  • Investissement: Au-delà des ingénieurs et techniciens affectés à la R&D et relevant du CIR/CII, il s’agit d’emplois destinés à améliorer la performance et la compétitivité de l’entreprise à moyen terme : analystes marketing, chefs de produits, commerciaux, qualiticiens, experts en nouvelles technologies, en développement durable, en RSE (Responsabilité Sociétale de l’Entreprise), chefs de projets …

Dispositif :

Dans un premier temps l’entreprise doit formaliser même succinctement sa stratégie de développement, son projet à moyen/long terme et la raison d’être des emplois d’investissement qu’elle entend créer : marchés nouveaux à conquérir, offres à développer, transformation numérique, évolutions du business model, réorganisation, compétences à acquérir, facteurs clés de succès à privilégier etc. Cela peut tenir sur quelques pages complétées par un business plan sur 3 ans, même pour une TPE.

Cette stratégie, présentée aux IRP, doit faire apparaître un plan de recrutement « d’emplois d’investissement » assortis d’objectifs chiffrés montrant un accroissement de chiffre d’affaires ou de productivité, portant sur des besoins en ressources nécessaires aux projets de développement figurant dans le plan stratégique, telles que commerciaux (France et/ou Export), chefs de projets, etc.

Pourquoi limiter la mesure à certains emplois ?

Il convient d’éviter tout effet d’aubaine qui subventionnerait un emploi de production ou de substitution qui serait créé quoiqu’il advienne. Il faut également se prémunir de tout contournement qui consisterait par exemple à licencier / réembaucher un salarié existant pour bénéficier de l’exonération.

Il n’est pas question de contraindre les entreprises à embaucher. C’est à elles de faire le premier pas. Il convient en revanche de les y inciter, de reconnaître le risque pris et en échange, de leur procurer un allègement de charges. L’idée est donc de mobiliser la trésorerie des entreprises en priorité vers le financement d’emplois d’investissement en lieu et place de tout ou partie des cotisations Pôle Emploi.

Il s’agit de reconnaître, récompenser, encourager, anticiper et faciliter la prise de risque entrepreneurial lié à l’innovation et au développement sous toutes ses formes.

Le CIR et le CII répondent en partie à cette exigence, mais ne concernent que les innovations technologiques. Études Marketing (France ou Export) ou plus généralement sujets non technologiques, conquête de nouveaux marchés, intégration du numérique, lancements commerciaux, capitalisation des connaissances, projets de « changement » ou de « réorganisation » contribuant à la compétitivité, accompagnement par le management, appointements d’experts non technologiques, de chefs de projets ou de managers transverses sur des questions de support QSE, RSE, d’accompagnement à la certification ISO etc. sont autant d’efforts qui n’entrent pas dans le champ du CIR et du CII. Par exemple, seul du temps « ingénieur » est reconnu par le CIR, pas celui d’un analyste marketing ou d’un chef de produits sortant d’une école de commerce.

Dans une moindre mesure, il s’agirait également d’encourager la préservation d’emplois, à savoir de différer ou d’amortir leur ajustement conjoncturel en cas de baisse d’activité. La modération salariale prévue dans la loi Sapin du 14 juin 2013 répond pour partie à cette exigence.

Il ne s’agit pas non plus, comme le laissent entendre certaines déclarations du MEDEF, d’embaucher des ouvriers ou des agents de service à se tourner les pouces en attendant que les commandes ou les clients arrivent. Il s’agit de faciliter des recrutements visant à générer de nouveaux contrats et donc de futures embauches.

Les mesures incitatives doivent donc être focalisées les d’emplois d’investissement, les plus risqués.

Modalités de mise en œuvre :

La stratégie de l’entreprise et son plan de recrutement sont présentés aux partenaires sociaux puis à l’ensemble des employés, figurent dans la BDES, puis déposés en tant que référence probatoire et en toute confidentialité à la CCI ou à la DIRECCTE. Un représentant du personnel, ou un employé référent dans les TPE, est nommé pour être associé au suivi du déroulement du plan de recrutement.

Les questions de formation (à l’anglais, aux nouvelles technologies, à l’action commerciale, au management) ne sont volontairement pas abordées dans le cadre de cette proposition car elles relèvent de mécanismes de financement différents.

Dès le recrutement du premier emploi de développement, l’entreprise est dispensée le mois suivant de toutes ou partie de des cotisations ASSEDIC. Pour des raisons de transparence, de lisibilité et de sécurité, il faudra identifier dans la codification ROME de Pôle Emploi les métiers éligibles à ces emplois d’investissement.

On prévoira une déclaration trimestrielle semblable à celle du contrat de génération visant à s’assurer que l’emploi demeure pourvu et que la déduction de cotisations reste donc licite.

Si, pour quelque raison que ce soit, l’employé quitte l’entreprise et n’est pas remplacé sous un mois, la déduction cesse d’être possible.

Avantages :

Le CIR/CII est trop ciblé sur des fonctions d’ingénierie, trop complexe et de fait peu d’entreprises en bénéficient, ou alors elles doivent laisser en chemin un pourcentage substantiel des crédits octroyés à des officines intermédiaires. Le système proposé doit être simple de telle sorte à ce qu’il soit facilement compréhensible, accessible rapidement à toutes les TPE, PME et ETI et qu’il génère le moins de charges administratives possible.

Inconvénients :

La mise en œuvre de ce dispositif amputerait Pôle Emploi d’une partie de ses ressources. Il conviendrait d’effectuer des simulations mettant en balance sur les plans économique et financier ce manque à gagner et la diminution du montant d’indemnisations résultant des emplois créés.

Les indemnités chômage représentant environ la moitié du salaire, si 100000 emplois sont créés, ce sont des cotisations finançant 200000 emplois qui ne sont plus versées…

Certains employeurs peu scrupuleux tenteront d’abuser de ce système et de faire passer des vessies pour des lanternes, à savoir faire passer du temps de gestion ou de production pour du temps d’investissement, comme en ont été victimes le CIR ou la formation continue. Il reviendra au salarié référent ou au DP d’alerter la DIRECCTE en cas d’abus manifeste. Pénalités et sanctions exemplaires, sur le plan de la réputation et/ou sur le plan financier, sont donc à prévoir.

Effets économiques :

La mesure visant à déduire de la totalité des cotisations Assedic la masse salariale des emplois créés trouve son point d’équilibre autour d’un emploi créé pour environ 25 emplois existants.[1]

En effet, les cotisations ASSEDIC sont de 6,4 % du salaire brut (2,4 %  de part salariale et 4% de part patronale). Donc 15 personnes en salaires bruts *6,4% = environ 100% d’un salaire brut moyen. Les cotisations patronales étant de l’ordre de 50% du brut, il faut donc 22,5 salaires bruts moyens (arrondis à 25) pour que les cotisations ASSEDIC 22,5*6,4% recouvrent le coût total d’un salaire moyen.

Exemple : Pour 25 personnes au salaire brut moyen de 1700 €, cela représente 1700*6,4% = 2720 €, soit la masse salariale équivalente à un salaire brut de 1915 € (en prenant 1,42 comme ratio masse salariale / salaire brut), qui constitue un salaire de base tout à fait honorable pour ce type d’emploi. On pourrait même admettre que le salaire proposé soit légèrement inférieur (1750 €) et que la différence finance la formation et l’accompagnement du nouvel embauché.

Concrètement :

  • Si l’effectif de l’entreprise est supérieur à 25 ETP, elle déduit de ses cotisations ASSEDIC le montant de la masse salariale chargée de ces emplois d’investissement, pendant 18 mois (ou pendant 24 mois avec dégressivité de moitié à partir du 13° mois). Elle peut créer plusieurs emplois d’investissement et bénéficier de cette déduction à raison d’un nouvel emploi par tranche de 25 ETP (2 emplois déductibles pour 50 ETP, 3 pour 75 etc…)
  • Si l’effectif de l’entreprise est inférieur à 25 ETP l’entreprise bénéficie du même abattement intégral de cotisation Assedic. Compte tenu de la moindre masse salariale, cet abattement peut ne pas financer intégralement un poste à plein temps, et donc
    • soit un emploi d’investissement est créé en CDI à temps partiel (au minimum 60%),
    • soit cet emploi est effectivement un plein temps et l’entreprise décide de prendre à sa charge le reliquat de salaire non couvert par l’abattement.

Il existe en France de l’ordre de 2 millions de TPE (1 à 9 employés), 160 000 PME (10 à 249), 4500 ETI (250-5000) et 200 Grands Groupes (>5000.). PME et ETI emploient environ 7 millions de personnes.

20% des demandeurs d’emploi sont constitués de cadres et de professions intermédiaires, susceptibles d’occuper ces emplois d’investissement, soit une population estimée à 800 000 personnes.

  • Si 25 à 30% des PME & ETI jouent le jeu, ce sont 100 000 emplois qui sont créés.
  • Si la plupart des PME & ETI jouent le jeu, ce sont plus de 250 000 emplois qui sont créés.

Mais surtout, dans un contexte économique où la demande est atone, les entreprises multiplient leurs chances de susciter la demande et d’aller conquérir de nouveaux contrats, eux même créateurs à terme d’emplois de production.

[1] Actuellement, l’embauche en CDI d’un jeune de moins de 26 ans donne droit à un abattement durant 4 mois des cotisations ASSEDIC patronales (4%). Cette disposition pourrait être généralisée aux emplois d’investissement, le ratio de 25 devenant alors mathématiquement 40 ETP. Alternativement, on peut laisser l’entreprise assumer la part salariale des cotisations.

 

3 propositions pour lutter contre le stress et le burnout

Le harcèlement et le burnout sont des fléaux, personne n’en disconvient. Dans certains cas, des arrêts-maladie pour épuisement ou des suicides sont maintenant requalifiés en accidents du travail. Vous en avez peut-être entendu parler, il est également question que le burnout soit reconnu comme maladie professionnelle. Il apparait toutefois nécessaire et utile de poursuivre des actions autour de trois axes complémentaires  à cette reconnaissance du burnout :

  1. L’évaluation annuelle obligatoire : Pratique courante, l’évaluation annuelle des salariés permet de formaliser l’évaluation des performances de l’année passée et la détermination des objectifs de l’année à venir. Elle fournit en théorie l’occasion d’un dialogue approfondi. En pratique, elle se résume trop souvent à un exercice administratif ponctué par la signature d’un document. Et à la différence de l’entretien professionnel biennal portant sur les évolution de carrière, cet exercice d’évaluation annuel est facultatif. L’idée serait de le rendre obligatoire et d’y inclure, comme cela se pratique dans certaines branches, un temps de prévention du stress et donc du burnout portant sur les conditions de travail et l’équilibre vie privée / vie professionnelle. Bénéfice collatéral : cela obligerait l’entreprise à un pilotage régulier de des collaborateurs, à une évaluation formelle et régulière de ses performances, légitimant d’autant les promotions mais aussi les recadrages et les sanctions, voire les séparations. Cela me parait nettement plus pertinent que de plafonner aux prud’hommes les indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
  1. La protection des lanceurs d’alerte aux RPS : bon nombre de salariés, directement objet de harcèlement ou de pressions, ou bien simples observateurs de tels agissements, craignent pour leur emploi et donc choisissent d’encaisser ou de ne pas voir ces situations dramatiques. Les IRP sont trop peu souvent sollicités, et parfois suspects d’une certaine connivence avec la direction. Il faut donc permettre à tout salarié victime ou observateur de faits stressants anormaux d’alerter des autorités extérieures à l’entreprise, tout en lui garantissant une protection totale.
  1. La pénalisation des managers harceleurs : Haro sur le pervers-narcissique ! Il faut frapper « d’interdiction de manager » tout manager condamné pour harcèlement, au même titre qu’un dirigeant en faillite frauduleuse ou un moniteur pédophile peuvent se retrouver en interdiction d’exercer. Une telle perspective en calmerait plus d’un

3 sujets sur lesquels je suis preneur de tout retour, commentaire ou témoignage.

 

L’appel de La Rochelle – 30 août 2014 : « Pour que Vive la Gauche »

L’heure n’est plus à la déception ou à l’alerte, mais à un puissant sursaut collectif.

Plusieurs crises s’additionnent et n’en finissent pas. La durée et la profondeur de la récession minent le quotidien des Français et la confiance  en un destin collectif. Privées d’une amélioration de leurs conditions de vie, les classes populaires et moyennes ont exprimé leur colère. Le vote majoritaire d’un sombre dimanche en faveur de l’extrême-droite a été le révélateur insupportable d’une société sous tension.

Nous devons retrouver notre force collective pour orienter le présent et  permettre un avenir de progrès. Il y a urgence à redonner justice et efficacité à des politiques enlisées, sans résultats ni perspectives.

La vocation de la gauche, c’est de porter l’espoir, non pas de risquer un renoncement continu, ou de s’excuser sans cesse de ce que nous sommes. A s’écarter de leurs engagements, les socialistes se divisent. A les oublier, nous nous perdrons. Les applaudissements du Medef ne seront jamais le critère de notre réussite.

Nous choisissons de ne pas subir une suite d’événements qui préparent d’amers lendemains. Nous avons une conviction bien ancrée : pour se réinventer, la France a besoin d’une gauche fière d’elle-même et de ses valeurs.

L’idéal progressiste est notre ressort, comme il est celui de millions de gens. Au lendemain des élections municipales et européennes, deux défaites sans précédent, des parlementaires de notre majorité ont choisi de s’exprimer dans l’Appel des 100 et d’agir, conscients des enjeux et responsables du mandat qui leur a été confié. Nous leur apportons notre soutien pour les choix décisifs des prochaines semaines au Parlement.

Aujourd’hui, alors qu’elle dirige le pays, la gauche a une obligation de fidélité à ses engagements et un devoir d’audace pour proposer des solutions modernes. Devant les inégalités qui déstructurent la société, les chocs climatiques, les excès financiers ou les drames du chômage, nos réponses ne sont pas celles de la droite.

Nous préférons les réformes de fond, avec des choix clairs, aux audaces de surface : une réforme fiscale conforme à nos engagements, une seconde loi bancaire utile à l’économie réelle, les bases d’un nouveau modèle de développement social, écologique et numérique.

Contre la récession, nous proposons un plan d’urgence alliant un soutien ciblé aux entreprises, du pouvoir d’achat supplémentaire pour les familles et un  maintien des capacités d’investissement local. Opposer facticement l’offre et la demande est une vision dépassée. La gauche du 21ème siècle doit aider l’offre par une demande soutenue, soutenir la demande par une offre adaptée. C’est le bon chemin.

Contre l’épuisement démocratique et la colère qui s’expriment, nous devons dépasser les institutions asphyxiantes de cette Vème République corsetée. Pour permettre à la gauche de rassembler durablement une majorité sociale et politique, nous devons changer les modes de représentation et de délibération de notre pays et les adapter aux temps présents.

Ni conformismes, ni tabous, mais des principes ! La gauche se doit à sa mission de transformation, avec la justice et l’égalité comme boussoles. Face au risque de délitement, il faut recréer les conditions d’une démarche commune rassemblant la gauche, sans laquelle rien ne peut réussir.

Nous sommes socialistes. Notre parti, porté par ses militants, peut encore proposer un avenir à une gauche française orpheline de ses ambitions. Nous appelons toutes celles et tous ceux qui veulent se réapproprier l’espoir commun, à se retrouver pour agir ensemble. Et pour que vive la gauche !

Pour signature : contact@vivelagauche.fr

 

 

 

Nos idées et nos rêves : 10 propositions pour la démocratie municipale

La lettre NINR «Nos Idées et Nos Rêves» fait référence à l'ouvrage d'Arnaud Montebourg «Des idées et des rêves» paru en 2010 avant la campagne des Primaires et réédité fin 2013 en format de poche chez « J'ai Lu ». Elle parait le dernier lundi de chaque mois sous la responsabilité de Monique Herment et Paul Alliès, secrétaires nationaux et nationaux adjoints du Parti Socialiste.

Elle exprime donc des points de vue de responsables et militants socialistes s'inspirant de l'action et des idées d'Arnaud Montebourg sans engager pour autant le Ministre du Redressement Productif. Dans le même sens, elle fournit des informations sur l'activité de ceux qui interviennent dans les Fédérations pour la rénovation du socialisme.

 

Cette lettre N°3 expose 10 propositions pour la démocratie municipale. Tous les candidats tetes de listes socialistes ou d’union de la Gauche sont invités à en prendre connaissance et à les intégrer dans leur programme.


1 ? Non-cumul des mandats tout de suite.

2 ? Transparence tout le temps.

3 ? Ethique et déontologie pour tous.

4 ? Publicité de tout.

5 ? Indépendance garantie de la société civile.

6 ? Statut pour tous les élus.

7 ? Participation des citoyens.

8 ? Partage de l'urbanisme.

9 ? Soutien aux circuits courts et solidaires.

10 ? Démocratisation des organes de concertation et de coopération intercommunale.

 

L’intégralité de la lettre et des propositions est téléchargeable ici.

Une dégénérescence oligarchique. Un appel de la Convention pour la 6° République

Le mensonge le plus symbolique de Jérôme Cahuzac restera celui proféré devant l'Assemblée Nationale en séance publique le 5 décembre 2012. Il est celui d'un ministre régalien devant une institution qui, ravalée en dernière position derrière le président de la République et le gouvernement dans le texte de la Constitution de la V° République, ne compte plus dans la pratique de celle-ci et dans l'esprit de celui-là.

Une République dont la tradition scandaleuse ouverte par l'affairisme immobilier, date de ses origines en 1958. En effet, s'il y a des aspects circonstanciels dans la dernière affaire en cause, il y a un vice caché dans le détail de ce régime : celui de l'irresponsabilité qu'il organise à tous les niveaux, de la présidence de la République aux pouvoirs locaux. Obsédés par leur volonté d'installer un « exécutif fort », les pères fondateurs de notre loi fondamentale ont abaissé tous ce qui pouvait faire ?uvre de contre-pouvoir. La bipolarisation a si bien fonctionné que les alternances consécutives à une élection présidentielle se sont avérées incapables de produire une alternative politique significative : les méthodes de gouvernement, les systèmes d'arbitrage, le personnel de décision et finalement les m?urs, restent les mêmes. Il y a bien une lente dégénérescence  oligarchique qui explique aussi le scandale Cahuzac.

Le résultat est dans ces chiffres accablants tels qu'ils ressortent des enquêtes d'opinion : 72% des Français « ne font pas confiance aux responsables politiques » (Harris, mars 2013) et autant jugent que « le système démocratique fonctionne plutôt mal en France » (Ipsos, janvier 2013).

Aucune réforme depuis l'élection de François Hollande n'est venu combattre cette tendance. Depuis le renvoi aux calendes grecques de l'interdiction du cumul des mandats pourtant si populaire (82% des Français interrogés, par ailleurs  favorables à la limitation à deux mandats consécutifs) jusqu'à l'enterrement de la réforme territoriale, rien n'est venu améliorer le renouvellement du personnel comme de la vie politique. Les dispositions du rapport Jospin notamment celles  sur le renforcement du pluralisme à l'Assemblée nationale (la proportionnelle), la fin de l'inviolabilité du président de la République ou la prévention des conflits d'intérêts n'ont pas été retenues. Si bien que les propositions faites ce 3 avril par François Hollande apparaissent comme singulièrement inadaptées     (y compris celle concernant l'indépendance de la justice).

La raison de cet immobilisme tient sans doute au fait que les révisions constitutionnelles successives (en particulier celle de 21 juillet 2008) se sont enlisées dans le renforcement du présidentialisme. Si la gauche ne veut pas être emportée par celui-ci, il lui faut faire preuve d'audace démocratique et engager une réforme d'ampleur. Les projets et les propositions surabondent et font l'objet de plus de consensus qu'il ne semble. Ils trouveraient facilement le soutien de l'opinion. L'Elysée ne veut pas ? Que des parlementaires se saisissent des opportunités de l'article 89 de la Constitution selon lequel « l'initiative de la révision appartient concurremment au président de la République et aux membres du Parlement ». Si des députés ou des sénateurs le veulent, un débat peut s'ouvrir sur la possibilité d'une autre République. Ce serait un début de réponse courageuse à la décomposition qui menace cette majorité.

La Convention pour la 6° République  

Le 4 avril 2013, 18h

Une loi sur le non cumul des mandats – Paul Allies dans Mediapart

Comme prévisible, la révision constitutionnelle prend l’eau de tout part. A force de la vouloir consensuelle et d’en faire un fourre-tout, des réformes simples et populaires risquent d’en faire les frais alors qu’elle ne coûtent pas un Euro. C’est le cas avec le non cumul des mandats. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? On pouvait penser que les candidats socialistes aux Législatives de 2012 qui avaient signé un document par lequel ils s’engageaient à abandonner leur mandat exécutif local s’ils étaient élus, s’exécuteraient sans problème (plusieurs l’ont déjà fait). Que nenni. De rapides sondages auprès des nombreux élus cumulards renouvelables ont fait apparaître leur préférence pour le mandat local. En d’autres termes, s’ils étaient obligés de choisir lors des prochaines Municipales en mars 2014, ils garderaient leur mandat de maire et abandonneraient celui de député. En l’état actuel du droit, leurs suppléants à l’Assemblée Nationale ne pourraient pas les remplacer et il faudrait procéder à des élections partielles. Celles-ci pourraient se compter par dizaines (on a donné le chiffre d’une soixantaine). L’idée est alors venue à Claude Bartolone de modifier le régime des suppléants des députés avant le vote d’un texte sur le non-cumul. L’idée n’est pas saugrenue: pour éviter ce qui pourrait tourner à une élection législative à mi-mandat, le président de l’Assemblée Nationale fait de la réforme de la fonction des suppléants, un préalable; mais pour dire aussitôt qu’elle nécessiterait une modification de la Constitution. D’où la diversion: une loi serait bien votée avant cet été mais ne s’appliquerait qu’après les Municipales, plus précisément en 2016 puisqu’un an avant des élections législatives il n’y a pas lieu à élection partielle. En réalité, il est parfaitement possible de changer la règle sur les suppléants sans forfaiture ni enlisement constitutionnels. L’article 25, alinéa 3 de la Constitution est limpide: une loi organique (article 46) suffit pour cela. Autrement dit une majorité absolue des députés composant l’Assemblée (et pas seulement des présents en séance) doit voter le texte quand bien même le Sénat s’y opposerait (les sénateurs étant eux aussi concernés). Seuls des délais spécifiques plus longs que d’ordinaire, s’imposeraient (six semaines après le dépôt du texte devant l’Assemblée, quatre après sa transmission au Sénat). Mais le recours à la « procédure accélérée » pourrait les raccourcir. Il est donc parfaitement clair, dès lors que la Constitution renvoie expressément à une loi organique comme c’est le cas ici, qu’un accord entre la majorité et le gouvernement suffit pour le voir adopter. La Gauche et les socialistes en particulier ne peuvent différer encore une fois l’interdiction du cumul des mandats. Les adhérents du PS ont voté à une écrasante majorité, lors d’un référendum militant le 1° octobre 2009, puis dans une convention nationale le 3 juillet 2010, le principe et les règles détaillées du non-cumul d’un mandat de parlementaire avec un exécutif local. Les nouveaux statuts du parti adoptés le 11 octobre 2012 intègrent (art. 1.4.3) ces dispositions « y compris dans le temps, soit trois mandats consécutifs maximum ». Le rapport rendu par la commission Jospin en novembre dernier en a repris tous les dispositifs (si bien qu’on peut penser que six mois ont été perdus à y réfléchir en lieu et place des militants et des députés). La marche vers le mandat législatif unique est partie intégrante d’une restauration laborieuse de la confiance des Français dans leur système et personnel politiques. Le système est délabré. Le personnel n’en a que plus de responsabilités. Un manquement dans cette entreprise économe de moyens et populaire, ne lui serait pas pardonné.