Au mois de septembre, on s'attend à entendre parler rentrée des classes, malaise dans l'éducation nationale, ou bien encore prix du logement, autant de marronniers dont se gargarise la presse en pareille saison.
Nenni, les affaires sont les affaires, et ce dernier mois d'été ne sera qu'un long hommage à Octave Mirbeau.
Dès le 1er Septembre, on apprend que ce bon Dominique Paillé, ex-porte-parole du Président, redevenu Radical, est viré de l'OFII (Office Français de l'Immigration et de l'Intégration). La raison ? Son penchant déclaré pour Borloo bien sûr, mais aussi sa propension à avoir pris au mot la mission des deux I de son Office, là où le patron ne veut voir en fait que des reconduites à la frontière. Il est prestement remplacé par Arno Klarsfeld, qui abandonne ses rollers pour déshonorer ainsi un peu plus son patronyme et les combats de ses parents.
Puis vient le campus UMP, où malheureusement cette année les rituels gloussements et trémoussements de Morano sont éclipsés par deux actualités plus ou moins mondaines.
- Le samedi, il est annoncé que Jacques Chirac ne pourra assister à son procès la semaine suivante, car souffrant d'anosognosie, c'est à dire de troubles de la mémoire.
- Le Dimanche, c'est le retour en France de DSK qui monopolise micros et caméra.
Ni le samedi ni le Dimanche, Bruno Lemaire annoncera le tant attendu programme de l'UMP pour 2012. C'est Raffarin et son désaccord sur la taxe frappant les parcs à thèmes, puis Marleix y allant de son couplet bien beauf-raciste sur Jean-Vincent Placé, qui « sauveront » le week-end.
Plus de 16000 postes supprimés, 1500 classes fermées, la formation des profs raccourcis d'une année, leurs salaires en berne : Sarkozy continue à « Moderniser la France ». Comble de cette modernité, la commune de Puy-Saint-Vincent dans les Alpes décide de financer sur ses fonds municipaux le recrutement d'une institutrice.
Sénatoriales : le parisien Pierre Charon, ex-proche du Président, annonce qu'il fait sécession et qu'il mènera une liste dissidente.
Mais on s'ennuierait presque, si la primaire du PS ne venait émailler l'actualité de son festival d'idées, de propositions et de débats.
C'est alors qu'éclatent ou se développent une suite de scandales d'une ampleur et à un rythme jamais vus auparavant. URBA-GRACCO ou les Diamants de Bokassa à côté de tout cela, c'est de la gnognote.
1/ les fadettes
Deux dirigeants du contre-espionnage français sont soupçonnés d'avoir espionné les factures téléphoniques (fadettes) d'un journaliste du Monde en vue d'identifier les sources de fuites relatives à l'affaire Woerth-Bettencourt l'été 2008.
2/ Karachi
Véritable feu d'artifice. La justice remonte petit à petit le fil via l'intermédiaire Takieddine, dont seul ou presque Médiapart parlait jusqu'à présent. Deux proches du Président, ayant activement participé à la campagne présidentielle de 1995, à une époque où Sarkozy était ministre du budget, sont soupçonnés d'avoir transporté des mallettes d'agent liquide provenant de rétro-commissions sur des contrats d'armement. Affaire dans l'affaire, c'est Hortefeux qui a mis en garde l'un d'eux en ces termes « Ta femme balance beaucoup », enfreignant ainsi le secret de l'instruction.
On apprendra d'ailleurs dans une indifférence quasi-générale que les comptes de campagne d'Edouard Balladur et ceux de Jacques Chirac auraient dû être invalidés, mais ne l'ont pas été grâce à la « bienveillance » du Conseil Constitutionnel présidé à l'époque par Roland Dumas, grand défenseur de la « Pompe Afrique ».
3/ « La République des mallettes »
Dans son nouveau livre-enquête, Pierre Péan explique comment depuis des lustres sont détournées ces commissions versés à divers intermédiaires. Toute la « famille », Villepin, Guéant, Sarkozy and c°, y trouve semble-t-il son compte.
4/ Monsieur Bourgi
L'avocat Robert Bourgi « soulage sa conscience » en racontant au Journal du Dimanche comment il a convoyé durant des décennies des valises d'argent provenant de chefs d'états africain à destination de Chirac, Villepin et même Le Pen.
5/ Clearstream
Villepin est relaxé en appel mais tout le monde s'en moque éperdument.
6/ Bettencourt, le retour
Lavée de tout soupçon, toutes les procédures l'ayant visée durant l'été 2010 étant closes, la comptable de Liliane Bettencourt raconte au quotidien Libération les versements d'argent liquides à diverses personnalités proches du candidat durant la campagne de 2007.
7/ un juge convoqué pour mise en examen
Dans cette même affaire Bettencourt, le juge Courroye est mis en examen pour « atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l’autorité publique »
8/ des ripoux ?
Le numéro 2 et trois dirigeants de la PJ lyonnaise sont interpellés pour corruption, trafic international de stupéfiants et blanchiment d’argent.
Mises en examens et contre-attaques en diffamation se succèdent à un rythme effréné. « Tout vit, tout agit, tout se correspond », mais ici nulle question de folie poétique, c'est un système entier, celui que le candidat Sarkozy dénommait « République exemplaire » qui est en train de se décomposer sous nos yeux.
Ultime exploit du Président de la rupture, le 25 septembre, la Droite perd au profit de la Gauche la majorité qu'elle détenait au Sénat depuis plus d'un demi-siècle. Les élus locaux sanctionnent ainsi la politique territoriale du pouvoir en place.
« Fin de Règne », « Chute d'un clan », « Le Boulet », titreront les hebdos la semaine suivante.
Puissent les mois qui viennent leur donner raison.