Chronique de la rupture #73 ? Janvier 2011

Matraquages « à la française »

 

L'année commence par les traditionnelles cérémonies des v?ux. Une première : certaines d'entre elles sont boycottées par des syndicats (CGT, enseignants) furieux d'être traités comme moins que rien. Journalistes et ambassadeur sont conviés à un improbable barnum intitulé « conférence de presse » où seules certaines questions sont admises.

 

Premier rideau de fumée de l'année, la réforme consistant à introduire des jurés populaires dans les tribunaux correctionnels est loin de faire l'unanimité : problèmes de financement, d'organisation mais surtout stigmatisation implicite des magistrats et des avocats en sont les principales critiques. « Une pulsion présidentielle », commente un grand avocat.

 

Dramatique prise d'otages au Niger, dans laquelle périssent deux jeunes français. On apprend à cette occasion que la France a changé d'attitude, a décidé la fermeté, ne négocie plus. Aurait-on ainsi laissé libre cours à des James Bond amateurs en mal de coup d'éclat pour attaquer le convoi des terroristes ? Eclat et amateurisme, ces deux traits navrants et récurrents du sarkozysme?

 

Eclat et amateurisme encore : les deux nouvelles « stars » de l'UMP, son Président JF Copé et le Président du groupe parlementaire à l'Assemblée Christian Jacob, en bons libéraux agitateurs besogneux, tentent de relancer le débat sur les 35h et sur l'emploi à vie des fonctionnaires mais se font vite retoquer par le Premier Ministre lui-même.

 

Eclat et amateurisme toujours, et coup dur symbolique : la radiation de l'Officier de Gendarmerie Matelly, également chercheur au CNRS, radiation décrétée par le Chef de l'Etat en 2010,  est annulée par le Conseil d'Etat.

 

 

Emeutes en Tunisie. Le mercredi 12 Janvier, à l'Assemblée Nationale, la Ministre des affaires étrangères propose, « le savoir-faire français » à la police tunisienne pour « régler les situations sécuritaires » (= taper sans laisser de traces ?). Deux jours plus tard, le Président Ben Ali dégage, chassé par la rue après 30 ans de règne sans partage, de corruption, de népotisme et d'abus de bien public. La diplomatie française passe complètement à côté de la plaque.

Rappelons que sans son discours d'investiture à la candidature en Janvier 2007, Nicolas Sarkozy se voyait «Président de la France des Droits de l’homme». Il promettait de ne pas oublier « ses valeurs pour gagner des contrats», et il affirmait qu'il ne croyait pas à la Realpolitik.

4 ans plus tard : «Je revendique une certaine réserve lorsqu’il s’agit de commenter les évènements de pays qui ont été la France et qui ne le sont plus »

Empêtré dans autant de contradictions, le Président nous honore de l'une de ses figures préférées : la référence à un cas similaire. Cette fois-ci ce n'est pas outre-Rhin qu'il va chercher le salut, mais en Côte d'Ivoire :

« après tout ce qu'on m'a dit lorsque j'ai demandé en décembre dernier au Président Gbagbo de quitter la Présidence ? »

Sauf que précisément, personne ne lui avait rien reproché lorsqu'il a formulé cette exigence !

Et qu'en est-il de l'Union de la Méditerranée, lancée à grand bruit en 2008 ?

 

Réductions de postes annoncées dans l'éducation nationale : passage de 24 à 30 élèves par classes dans le Val de Marne ;   493 postes supprimés à la rentrée 2011 dans l'Académie de Versailles, 122 dans les Hauts-de-Seine, remise en cause sans précédent de l’éducation prioritaire (les collèges en REP/ZEP passeront de 38 à 5 dans les Hauts-de-Seine) et remise en question des décharges de directeurs dans les Réseaux de Réussite Scolaire.

Rappelons que pour le Président, l'enseignement est une dépense et non un investissement, comme il l'avait si doctement déclaré lors d'une émission de TV. Dans le même temps, des primes de 22000 ? sont promises aux recteurs qui tiendront leurs objectifs de réduction des coûts. N'en pouvant plus, un Proviseur Honoraire du Nord de la France renvoie ses palmes académiques.

 

Rififi dans les Hauts-de-Seine : tombé en disgrâce à l'Elysée pour avoir parlé de « nettoyer les Ecuries d'Augias », le Président du Conseil Général Patrick Devedjian apprend que Mme Isabelle Balkany entend lui ravir son siège à la faveur des élections cantonales de Mars prochain. La gauche est en embuscade : Anne-Eugénie, Chloé, Rachid et les autres, nous sommes avec vous !

 

Grand cirque du G20-G8 : D'un coup, il n'y a pas plus Keynésien et régulateur que Sarkozy, il est sur tout les fronts, c'est lui le Chef du Monde : J'ai vu Mâme Maerkel et lui ai de mandé de bla bla bla, j'ai parlé de bla bla bla à Obama, j'ai dit à David Cameron que bla bla bla, Dmitri Medvedev m'a bien confirmé que bla bla bla.


Le G Vain, selon Bernanrd Attali. Le discours est impeccable, même Rocard le dit. Qu'en est-il des actes ? Rappelons que nous attendons a minima :

  • La taxation des transactions financières
  • La suppression des paradis fiscaux
  • Le strict encadrement des Hedge Funds
  • L'indépendance des agences de notation

Visite en catimini du Président au Premier Cercle des donateurs UMP, réunis Porte Maillot : plus aucun doute sur sa candidature à la réélection en 2012, et en prime le Président y interprète ses meilleurs tubes : autosatisfaction sur les réformes, haro sur les 35 heures réaffirmation que l'ISF est un scandale, etc.

 

Eclat et amateurisme enfin, et dernier coup dur du mois : Le 28 janvier, le conseil des prud’hommes condamne Radio France, pour le licenciement « sans cause réelle et sérieuse » du chroniqueur Stéphane Guillon. Cela confirme le caractère arbitraire de ce licenciement, voulu par des dirigeants au passé pourtant ô combien estimable, mais qui se doivent maintenant de ne pas déplaire l'Elysée.

Chronique de la rupture #26

Avertissement au lecteur :

****il ne s’agit ni d’un bug ni d’une déchirure de l’espace-temps. Pour ne rien oublier dans les mois qui viennent, nous republions trois ans après au fur et à mesure les premières chroniques, telles qu’elles furent écrites à l’époque ****



 

 

JANVIER 2008

Reprise de nos chroniques, sur un rythme que l’on va tâcher de tenir mensuel, non parce que l’actualité de la rupture se raréfie, mais tout simplement pour des raisons de disponibilité en ces temps de campagne municipale…

Retrouvons nos héros là où nous les avions laissés.

Tout d’abord un constat : ce ne sont plus amis Lagarde et Michard qui relateront l’Histoire dans le futur, mais bel et bien Voici, Gala et autres Closer. O tempora, ô mores…

Rappelons que le paquet fiscal voté dès  l’été devait provoquer un choc de confiance, engendrant lui même dans la foulée un choc de croissance.  L’imbittable loi TEPA adoptée quelque temps plus tard devait quant à elle permettre la multiplication des heures supplémentaires défiscalisées dès octobre, engendrant une nette augmentation du pouvoir d’achat dès la fin de l’année. Il y avait aussi la croissance à 2,5% qu’il devait aller chercher avec les dents.

Interrogé au hasard en Egypte puis à Petra, un jeune couple désireux de conserver l’anonymat, NIcolas S. et Carla B., déclare off records :
« Oui effectivement le TEPA ça fonctionne, notre pouvoir d’achat a augmenté ce qui nous a permis de nous payer de chouettes vacances et une belle montre pour Noël ».  Tant mieux pour eux.

Conférence de  voeux à la presse le 8 janvier :  on y apprend que les caisses sont vides et que  pour le pouvoir d’achat on repassera, que  2008 verra la fin des 35 heures et de la pub sur France Télévisions. Bond immédiat des actions de TF1, M6 et des chaînes de la TNT, détenues par qui l’on sait.

Dès le lendemain, publication d’un démenti sur les 35 heures.

La semaine suivante, annonce ce la création d’Unités Territoriales (de police) de Quartier. Rien à voir bien sûr, avec la police de proximité supprimée il y a quelque années par un ministre de l’intérieur qui prétendait que les policiers n’étaient pas payés pour jouer au foot.

Renégociation du contrat de travail : durant la campagne présidentielle, on nous rebattait les oreilles avec les 38 contrats de travail différents, la nécessité de simplifier tout cela vers un contrat unique, dispositif dont même le medef ne voulait pas. Quelques semaines de négociations plus tard, nous aboutissons à une évolution du CDI, mais je n’ai entendu parler ni du renforcement des conditions d’applications du CDD, ni de la simplification effective de la jungle des contrats aidés. En revanche le code du travail aurait doublé de volume. à suivre …

Notre bonne ville de Boulogne-Billancourt fait irruption dans l’actualité. L’ex dauphin, ex UDF, répudié du presque sortant est intronisé par l’UMP pour les municipales et va nous refaire le coup de « la rupture c’est moi ». Rappelons seulement qu’il est élu de Boulogne, d’un de ses cantons ou de sa circonscription depuis 25 ans. Le sortant renonce, l’ex sortant décide donc de repartir au combat histoire de sauver ce qui peut l’être, notamment pour l’Ile Seguin. Parce que sur l’Ile Seguin, le projet de l’ex-premier ministre étant passé aux oubliettes, on parle maintenant d’un parc de sculptures en lieu et place des équipements déjà programmés. Coût des dédits : plusieurs dizaines de millions d’euros. Une paille. Matériau dont semble être constitué d’ailleurs l’un des prétendants qui ne parle plus ni de sculptures, ni du tunnel de la N10 … la suite sur www.boulognebillancourt2008.com

Les Municipales toujours : en novembre selon Sarkozy, elles devaient être une élection nationale. Aujourd’hui (comme tous les ans en Janvier ?) « j’ai changé ! » : plus question de test national. La photo du président a disparu des tracts de l’UMP locale, le nom de l’UMP a disparu du matériel électoral bordelais. Et la journée du Président en Aquitaine, chez MM Juppé à Bordeaux et Bayrou à Pau, devant à l’origine inaugurer une tournée de  visites de soutien aux campagnes municipales locales, s’est résumée à … mais à quoi au fait, quelqu’un peut-il le dire ?

Tout cela est assez piteux, convenons-en.

Publication du rapport Attali sur la croissance. Quelques éléments intéressants au premier abord.
Première synthèse en cliquant ici.

« J’appliquerai toutes les recommandations » avait dit le Président. « Sauf 3 » ajouta-t-il ensuite. Nous verrons bien.

Et ce premier mois de l’année s’achève au Taj Mahal, sans contrat ni Carla. Ni Carlos d’ailleurs.

« Big bizoux »

Pour une révolution fiscale

Un impôt sur le revenu pour le XXIe siècle

par Camille Landais & Thomas Piketty & Emmanuel Saez

La fiscalité française est asphyxiée par sa complexité, son manque de transparence et l’accumulation de privilèges pour une minorité de contribuables ultra-riches. Mais on en reste trop souvent, en la matière, à des énoncés aussi vagues que stériles. Ce livre innove en proposant une critique d’ensemble du système fiscal français. Il est accompagné d’un site Internet permettant à chacun d’évaluer les propositions des auteurs et de concevoir une réforme alternative : www.revolution-fiscale.fr.


Cet ouvrage démontre scientifiquement, pour la première fois, le caractère régressif de l’impôt dans notre pays (ce qui signifie que, tous prélèvements confondus, les taux d’imposition sont plus élevés pour les ménages les plus modestes et s’abaissent pour les plus riches). Pour cette raison, il fera date. Mais cette analyse au scalpel ne se contente pas de mettre au jour l’injustice du système. Elle plaide pour une révolution fiscale, chiffrée et opérationnelle, fondée sur trois principes : équité, progressivité réelle, démocratie. Ce livre contribue de manière décisive à l’édification d’une nouvelle critique sociale et se pose au centre du débat politique pour les années à venir.

En librairie le 27 janvier 2011.

Camille Landais, Thomas Piketty, Emmanuel Saez, Pour une révolution fiscale. Un impôt sur le revenu pour le XXIe siècle, La République des idées / Seuil, Paris, 01/2011, ISBN 978.2.02.103941.2, 11,50 ?

les sondages des copains

Ainsi donc, un « sondage » nous apprend que Ségolène Royal fait partie des personnalités qui « agaceraient » le plus les Francais.

 

La présidente de la région Poitou-Charentes réélue avec plus de 60 pour cent des voix, finaliste de l’élection présidentielle en 2007 avec dix sept millions de voix des Francais et candidate aux primaires pour la prochaine présidentielle, se trouve, dans ce palmarès, en compagnie d’acteurs, de sportifs et autres chanteurs de variété. Histoire sans doute de la dénigrer tout en la  » people isant »

 

La semaine dernière Nicolas Sarkozy a été sacré  » l’homme politique de l’année » , à la une du Journal du Dimanche appartenant à son ami Arnaud Lagardère. Plus c’est gros, plus ça passe ?

La guerre des sondages , comme nous l’avions prévu, a donc commencé. La démocratie impose qu’on ne laisse pas faire.

Cette « information » appelle plusieurs questions, pour que les citoyens éclairés qui refusent l’abrutissement, l’infantilisation, et la manipulation des esprits, puissent combattre l’offensive sondagière de la droite, alimentée par un budget de plus de 3 millions d’euros engagés par l’Elysée comme l’avait révélé le rapport de la Cour des comptes:

1) A qui appartient l’institut de sondage Ifop qui, la semaine dernière a présenté Nicolas Sarkozy comme la personnalité de l’année ? A Laurence Parizot, la Présidente du Medef

2) L’ « agacement » est il une valeur politique de nature à informer les électeurs ? Combien de mots l’institut de sondage a t’il testé pour sortir celui là ? L’efficacité, la volonté, le courage, la détermination, la vérité, de Ségolène Royal ont ils été testés ?

3) Quel but recherche un institut de sondage en posant ce type de questions ?
4) Pourquoi une tel acharnement contre Ségolène Royal en cette fin d’année ? Serait-elle devenue l’adversaire la plus dangereuse de la droite ?

Ne sommes nous pas en présence des techniques de manipulations classiques qui consistent à influencer négativement les conversations familiales de fin d’année, techniques de « bashing » largement utilisées par la droite bushiste aux USA, et que les équipes de Nicolas Sarkozy se sont vantées d’utiliser?

Nous ne laisserons pas faire. Mieux. Nous nous battrons car nous savons qu’il en va de la démocratie. En démocratie, seule la victoire des urnes compte véritablement. Ni les oracles, ni les propagandistes ne pourront remplacer l’acte du vote. Ils ont essayé en 1995, qui devait voir la victoire  » au premier tour » prédisait même un certain Nicolas Sarkozy d’Edouard Balladur. On connait la suite…

Que toutes celles et tous ceux qui pensent qi’il faut combattre la dégradation du débat politique, que toutes celles et ceux qui veulent qu’enfin se termine cette longue nuit du Fouquet’s ou tous les coups sont permis, se mobilisent sur internet, sur le terrain, car c’est une conception de la démocratie et du respect de l’opinion qu’il faut défendre.

 

Le combat ne fait que commencer, c’est celui de la liberté de conscience contre le pouvoir de l’argent que permet ces sondages relayés par des médias complaisants.

Face à ce cercle vicieux, il y a le cercle vertueux, celui des citoyens. Ceux qui sont de plus en plus nombreux à venir à la rencontre de Ségolène Royal dans son tour de France (là ou Nicolas Sarkozy ne peut plus se déplacer au risque d’avoir à affronter le mécontentement du peuple), des nombreuses marques de soutien et de mobilisation, de l’espoir qu’elle suscite, du courage et de la volonté d’avancer jusqu’au bout qui est la sienne. Avec elle, nous avançons, c’est le peuple qui vote, pas les sondages trafiqués.

 

 

L’équipe de Ségolène Royal