« L'Etat, c'est moi ! »
Un nouvel exemple du marketing sarkozien à l'usage exclusif des Français : www.elysee.fr
Depuis mercredi 26 septembre 2007, les internautes peuvent apprécier la nouvelle version du site de la présidence de la République sur www.elysee.fr. Passée la stupéfaction première d'une transposition intégrale du site de campagne du candidat Sarkozy (www.sarkozy.fr), on s'interrogera sur la finalité d'une telle démarche ?
C'est François de La Brosse, directeur de l’agence de communication ZNZ Groupe, communicant affecté au façonnage de l'image du personnage Sarkozy, qui a également été chargé d'effectuer la migration du site du candidat vers le site de la Présidence de la République. Et ce, pour des raisons économiques, nous assure-t-on. Mais d'évidence ce « copier-coller » de propagande visuelle, où la part belle est laissée à l'image, de la photo à la vidéo, ignore l'institution que le président Sarkozy est sensé représenter. C'est un panégyrique illustré des pérégrinations, des allocutions et des rencontres de l'homme Sarkozy ; on notera l' « audacieuse » adaptation de la NS-TV (Nicolas Sarkozy-TV) transformée en PR-TV (Président de la République-TV). C'est l'individu et non la fonction qui s'impose au citoyen. Tout sentiment de mégalomanie serait déplacé !
Dès la page d'accueil, dans le bandeau supérieur, son visage s'impose à nous sur fond du portail de l'Elysée avec drapeau bleu-blanc-rouge flottant aux quatre vents. Les symboles de la République ? Relégués à la droite de l'écran… Indéniablement, la joie d'occuper cette fonction tant convoitée fait oublier à notre président les devoirs qui incombent à son statut de représentant de la Nation française. Vous êtes chef de l'Etat Monsieur Sarkozy. Vous devez conduire la politique de la France, avec respect et impartialité, entouré par un gouvernement que vous avez désigné. Non Monsieur Sarkozy vous n'êtes pas le seul animateur de la République. Non Monsieur Sarkozy votre cohorte de collaborateurs ne saurait remplacer les agents du pouvoir gouvernemental que sont vos ministres. Non la République ne se réduit pas à votre seule personne. Omniprésence et omnipotence sont toutes sauf des valeurs démocratiques. Pour le moins, c'est « le fait du prince » qui s'exerce bien que vous vous en défendiez encore récemment avec la « nomination » de votre successeur pour la mairie de Neuilly-sur-Seine. Votre vision de la présidence de la République s'affiche désormais sans retenue : « l'Etat c'est moi ! ».
Pour preuve de cette effroyable machine de communication sarkozienne qui souhaite tout engloutir sur son passage, réduire la présidence de la République française à l'image d'un seul individu, il suffit de considérer la place réservée aux affaires de l'Etat. On pourra, en effet, si on le souhaite, s'enquérir des actions du pouvoir exécutif en 3e sous-partie du 9e et dernier onglet qui propose les comptes-rendus du Conseil des ministres ! Quel altruisme ! De même, on appréciera, non sans une certaine ironie, l'hommage involontaire rendu à l'ancien Président Chirac au chapitre « L'Elysée et les résidences » : « Le Président Jacques Chirac et son épouse se rendent régulièrement à Brégançon, durant l’été et lors des vacances de Pâques [sic]. » Par contre, l'annexion du Pavillon du Cerf, demeure réservée au Premier Ministre, si souvent réquisitionnée par le chef de l'Etat, n'est pas encore intégrée au patrimoine élyséen. Quelle retenue ! On regrettera qu'une photo dédicacée ne soit pas disponible en ligne…
Enfin, pourquoi cette nouvelle version de www.elysee.fr n'est-elle accessible qu'en français ? Et surtout pourquoi avoir conservé l'ancienne charte graphique, qui présente dans le bandeau supérieur les insignes de la République sur fond de drapeaux français et européen, pour les Internautes anglophones, germanophone et hispanophones ? Notons que l'accès est possible via le nouveau site par l'onglet « Elyséethèque » puis le dossier « Archives ». Craindriez-vous Monsieur Sarkozy les remontrances de vos homologues européens ? Vos interventions intempestives et la brutalité de vos propos auraient-ils déjà mis à mal votre stature internationale ?