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Actualité politique, économique et sociale

La République à l’arrêt

« les gilets jaunes sont dans la rue »  « partis politiques et syndicats ne représentent plus rien » : comment en sommes-nous arrivés là ?

« 30 ans qu’on a rien fait »… revenons seulement 12 ans en arrière.

Je n’attendais rien de Sarkozy. Je n’ai donc pas été déçu. J’ai été impressionné toutefois, par la vulgarité constante de son comportement et de ses propos, par les 600 Milliards (30% du PIB) d’accroissement de dette publique qu’il nous a laissés, par le nombre d’affaires politico-financières dans lesquelles il est encore impliqué, par le nombre de ses proches qui le sont également, qu’il s’agisse de son ancien ministre de l’intérieur, parachuté malheureux aux législatives de 2012 dans notre circonscription, ou bien encore de son ancien premier ministre, lui aussi englué dans des mises en examen.

J’attendais beaucoup de François Hollande. Sa sympathie, son affabilité légendaires ont été à la hauteur de ces attentes et ont positivement corrigé l’image présidentielle laissée par son prédécesseur. Le discours du Bourget semblait sceller la réconciliation des deux gauches. Ses toutes premières réformes (fiscalité, retraites, travail, mariage pour tous, école) ont été réussies. Mais dès 2013/2014 sont apparus des écarts grandissants avec le projet sur lequel lui et sa majorité parlementaire avaient été élu. En ont résulté dissensions internes, frondes, discrédit dans l’opinion, sanctionnés par quatre défaites électorales cinglantes, sur fond d’apathie totale au sein du Parti Socialiste, le tout étant conclu par une abdication en fin de quinquennat et un cataclysme électoral en 2017.

Lire à ce propos le magnifique livre d’Aquilino Morelle (L’Abdication, Editions Grasset 2017)  ou bien plus modestement, mon témoignage militant (Le grand gâchis)

La déception a été à la hauteur des espoirs soulevés en 2012 et de l’énergie militante dépensée avant comme après cette élection. Hollande aujourd’hui, tout à la promotion de son dernier livre, me donne une impression de déni de son propre bilan. Il n’est ni De Gaulle, ni Mitterrand, ni même Chirac. Comment peut-il espérer revenir un jour sur le devant de la scène politique ?

J’avais un certain espoir en Emmanuel Macron. Après avoir fait campagne pour Benoit Hamon en 2017, je m’étais résolu à penser que le nouveau président ferait réellement bouger les lignes. Son livre (Révolution, Editions XO 2016) exposait une analyse lucide de la situation et contenait quelques propositions intéressantes (sur le chômage, sur la réforme territoriale).

Dix-huit mois après, au tiers de son mandat, malgré quelques réformes courageuses, la déception est là encore immense.

Des cadeaux fiscaux insensés (abolition de l’ISF, abandon de l’exit tax, imposition uniforme des revenus du capital) profitent aux 1% voire au 1 pour mille des plus riches. Cela représente un manque à gagner de 5 Milliards d’Euros de recettes publiques. Et en même temps, l’hôpital public ou la justice, pour ne citer qu’eux, manquent cruellement de moyens. C’est le retour d’ascenseur au centuple des financements reçus pour sa campagne électorale, c’est le péché originel de Macron, comme l’ont été la loi TEPA pour Sarkozy ou le renoncement à la renégociation du Traité Européen pour Hollande.

Ce sont des taches indélébiles, des boulets dont il est difficile de se remettre. Sans évoquer le « parler cash » du président ou les mises en scènes faussement spontanées type « pognon de dingue ».

Tout cela occulte les améliorations de pouvoir d’achat résultant de transferts de charges : accroissement de la CSG, disparition des cotisations salariales URSSAF et Pôle Emploi, fin programmée de la Taxe d’habitation. La loi PACTE, la réforme territoriale, celle des institutions se font attendre. Le double discours sur les questions écologiques est, pour le moins, inquiétant. Les « J’assume » ou « Nous tenons le cap » n’impriment pas, exacerbent le malaise ou provoquent des haussements d’épaule.

Le parti du Président, LREM peine à se structurer et à exister localement. LR fricote avec Sens Commun. RN et LFI ne sont que des caricatures d’eux-mêmes. Le Parti Socialiste est inaudible, sous la houlette d’un premier secrétaire aussi transparent que ses deux prédécesseurs.

La République devait être en marche, elle est à l’arrêt.

Pendant tout ce temps, le monde de la finance, cet adversaire sans nom et sans visage, a régné sans partage, la planète s’est réchauffée de quelques degrés, les écarts de salaires ont été multipliés par 15, Carlos Ghosn et tant d’autres s’en sont mis plein les poches alors que le Français moyen voyait son pouvoir d’achat diminuer de 500€.

Pendant tout ce temps, n’importe quel(le) désespéré(e) ou abruti(e) muni(e) d’une perche à selfies et d’un gilet jaune peut s’autoproclamer porte-parole de la colère, prôner l’anarchie, étaler sa vulgarité et son inculture sur des chaines infos bien trop complaisantes et en mal d’audience.

Pendant tout ce temps, les extrêmes populistes prospèrent et se rejoignent, et pas seulement en Italie ou en Hongrie. Malgré leurs multiples mises en examen, ils s’allieront peut-être un jour pour prétendre faire le « bonheur des peuples », antienne favorite des dictateurs.

Subsistent du monde politique ancien quelques vestiges de droite, du centre ou de gauche, enfermés dans leur posture, soucieux de régner sur ce qu’il leur reste en guise de parti, impuissants à rassembler au-delà de leur clan et à formuler une vision enthousiasmante pour le pays.

Ceux qui en avaient le potentiel ont renoncé. Ils ont pris leur retraite ou préfèrent produire du miel, enseigner la philosophie, diriger une ONG ou une entreprise du numérique.

Comment sortir de cette crise des gilets jaunes ?

Face à des manifestations conjuguant émotions et pauvreté, seul un ensemble de symboles forts et de mesures concrètes peut préfigurer une sortie par le haut, n’obligeant personne à reculer et préservant les intérêts de chacun.

Les symboles, il peut y en avoir deux :

  • Face à l’anarchie, l’affirmation d’un soutien sans faille à une démocratie réellement participative, passant par une profonde réforme des institutions.
  • Face à ce syndrome du « président des très riches », il n’est toutefois pas envisageable de rétablir l’ISF dans sa forme ancienne. Son abolition était un engagement électoral, et son efficacité était discutée. D’où la suggestion alternative d’une CSG verte, progressive, taxant certains achats, (4×4 et autres véhicules émettant plus de 140g de CO2, billets d’avion longue distance, objets de luxe, résidences secondaires etc.), dans l’esprit de la TVA à 33% d’antan.

Les mesures concrètes, il peut également y en avoir deux :

  • A court terme, redonner sous une forme ou sous une autre 20 à 40€ par mois aux millions d’automobilistes qui de disposent que de leur véhicule pour se rendre sur leur lieu de travail. Coût approximatif 5 Milliards d’Euros, soit le manque à gagner résultant de la fin de l’ISF.
  • A moyen et long terme, engager ce vaste plan d’investissements (cf les 1000 Milliards pour le climat de Jouzel et Larrouturou ) concernant en priorité l’isolation de l’habitat et les transports terrestres (dont la conversion du parc automobile).

A suivre…

#Prélèvement à la source : le conservatisme des confédérations patronales…

Dépité par le conservatisme de @medef et de @cpme au sujet du #prélèvement à la source. Lorsqu’il s’agit de réduire les protections sociales, ils savent citer l’Allemagne, le Royaume-Uni, le Danemark ou tout autre pays apportant de l’eau à leur moulin ultralibéral.

Il n’y a que trois pays dans le monde qui ne pratiquent pas la retenue à la source : Singapour, la Suisse et la France. Cette mesure était dans le programme de François Hollande en 2012 puis dans celui d’Emmanuel Macron en 2017. Par deux fois donc, elle a été approuvée par les Français.

Et là ? Silence, gémissements, cela n’empêche pas ces confédérations patronales de se lamenter. Ils se disent progressistes mais ils sont plus un obstacle au progrès qu’autre chose. En attendant le débat sur la loi PACTE…

 

Tourner la page et maintenir la pression …

Je suis choqué d’avoir vu hier les retraités défiler dans la rue. J’en serai pourtant dans quelques années mais je ne me reconnais pas dans leur discours égoïste et aigri.

Cela fait près d’un an que le nouveau pouvoir est en place. Les réformes relatives à la transparence de la vie publique, à l’école, aux universités, au travail, au chômage, à la formation professionnelle vont globalement dans le bon sens même si certains aspects en étaient à mon sens perfectibles ou auraient pu être traités différemment (voir précédents articles sur ce blog). J’attends avec intérêt celles qui porteront sur les déserts médicaux, l’hôpital public, les conditions carcérales et le mille-feuille territorial.

Le transfert de charges sociales des salaires vers la CSG a été évoqué depuis des années et faisait quasi-consensus, alors attendons quelques mois et les effets de la suppression ciblée de la taxe d’habitation pour hurler au martyr des retraités. Fillon et Sarkozy avaient fait bien pire en supprimant la demi-part fiscale des veuves et veufs, sans parler de la Lybie, de Tarnac ou de bien d’autres scandales.

La SNCF et la RATP peuvent, doivent changer (comme l’ont fait Air France ou d’autres en leur temps) à condition que les carences décennales d’investissements soient compensées et que le service public soit maintenu sur tout le territoire. Nos institutions doivent également évoluer afin que le parlement soit en mesure de jouer pleinement son rôle. Le projet de loi PACTE sur l’entreprise (prise en compte dans son objet des impacts sociaux et environnementaux, entreprises à mission, participation accrue des salariés aux conseils d’administration) augure d’avancées majeures même si leur portée initiale sera d’ordre symbolique.

Le ministre de l’économie, libéral autoproclamé et assumé, a pris la mesure des enjeux industriels européens. Qu’il s’agisse des travailleurs détachés, de la taxation des GAFA ou des distorsions de concurrence imputables au protectionnisme des Américains et des Chinois, son action se traduit par un discours quasi keynésien, par des intentions, des orientations et des actes qu’un de ses prédécesseurs à marinière n’aurait pas renié. Et enfin, évoquer la notion de régulation au niveau communautaire, dans la perspective des élections européennes de 2019, n’est plus un gros mot.

Ce gouvernement s’attaque à tous ces désordres que nous n’avons cessés de déplorer depuis 15/20 ans, sur lesquels Chirac n’a rien fait, Sarkozy n’a gesticulé qu’en en vulgarité ou en trompe l’oeil, et Hollande a gâché le mandat que nous lui avions confié.

Et en même temps, le Président et son gouvernement nous déconcertent parfois :

  • Pourquoi jouer la provocation par des déclarations à l’emporte-pièce ou en recourant à nouveau aux ordonnances en 2018 ?
  • Pourquoi ternir l’image d’hospitalité de notre nation par la manière dont est menée la réforme du droit d’asile et d’accueil de populations opprimées ?
  • Pourquoi avoir octroyé ce cadeau fiscal aux plus aisés en réformant ainsi l’ISF et la fiscalité des revenus du capital ? Il en résulte un manque à gagner de 5 MM€ par an alors que la SNCF en a besoin de 3 pour se remette à niveau. Le prétexte en était de faciliter l’investissement dans les PME, louable intention. Il suffisait pour cela de relever le plafond de l’ISF/PME et de rationaliser certaines aides, ou bien de s’attaquer courageusement la grande réforme fiscale inspirée par Thomas Piketty et promise par François Hollande.

Dans le même temps, les oppositions populistes rivalisent d’outrance et de démagogie, et les modérées tentent péniblement d’exister en contestant plus ou moins mollement des mesures qu’ils avaient promises, qu’ils auraient pu mettre en œuvre ou soutenir ces dix dernières années. Ceux-là doivent admettre qu’ils ont perdu la partie, tel le PSG ou le XV de France versions 2018.

Que vient faire un Wauquiez à la tête du parti gaulliste ? Comment les « constructifs » du centre-droit peuvent-ils exister ? Que peut faire un Olivier Faure, pro-Macron en 2017, à la tête d’un Parti Socialiste crépusculaire, coincé sur sa droite comme sur sa gauche ? Comment Benoit Hamon et son mouvement Génération.s peuvent ils contribuer utilement, autrement que par une réponse utopique au souvenir nostalgique d’une époque révolue ?

Il m’attriste d’écrire ces lignes, pour avoir côtoyé dans un passé récent certains d’entre eux, que je respecte et admire profondément, et dont je regrette que le destin ne leur ait pas été plus favorable. Ce changement de vie sera difficile et je compatis au deuil qu’ils vont devoir surmonter. Il est temps pour eux de tourner la page, de renoncer à leur existence médiatique, d’aller ou de revenir travailler dans la société civile, tout en maintenant s’ils le désirent leurs engagements associatifs et locaux, et de laisser la place aux jeunes générations, en vue d’un jour, inéluctable, où la roue aura tourné et où celles-ci pourront à nouveau prétendre au pouvoir.

A mon modeste niveau de patron de TPE, je veux bien en embaucher un ou deux et porter gracieusement assistance à d’autres dans leur reconversion.

Surdose d’ordonnances, accueil des migrants, affaiblissement de l’ISF : 3 boulets irritants dont le pouvoir Macron aurait pu se dispenser, et qui ternissent son premier bilan. Attendons quelques semaines, maintenons une pression calme et déterminée, gardons l’espoir qu’il saura rectifier la trajectoire.

Et prenons soin des anciens camarades.

2012-2017 : Le grand gâchis

Ce livre est une narration du quinquennat de François Hollande, tel que vécu par un militant socialiste issu de la société civile. Cinq années, quinze en comptant celles qui ont précédé 2012, de soutien, de réflexion, d’actions, de déceptions, de frustrations, et de quelques satisfactions.

Citoyen de base devenu militant puis élu local, j’ai consacré, comme tous mes camarades, un temps et une énergie considérables à assister à de nombreuses réunions, à écrire des multiples contributions et à faire campagne sur le terrain, en soutien d’un projet qui avait porté François Hollande, le Parti Socialiste et la gauche aux responsabilités en 2012. En retour de ces soirées et de ces week-end pris sur le temps familial et sur les loisirs, nous étions en droit d’attendre que le pouvoir en place applique le projet pour lequel il avait été élu ou qu’il explique les raisons pour lesquelles il s’en écartait. Il n’en a rien été, ou très peu. Aussi m’a-t-il paru légitime de mettre en forme et de partager ce que j’ai pu modestement constater et comprendre de l’action gouvernementale ces cinq dernières années.

A aucun moment je n’ai regretté mes choix : ni celui d’avoir fait campagne pour Arnaud Montebourg lors des primaires de 2011 puis lors de celles de 2017, ni d’avoir soutenu François Hollande et d’avoir voté pour lui en 2012. Je n’ai pas non plus regretté ni d’être resté fidèle à mes convictions et aux propositions sur lesquelles François Hollande l’avait emporté, ni d’avoir fait campagne pour Benoit Hamon. Je n’aurai pas à regretter non plus d’avoir opté pour la démocratie le 7 mai dernier en votant pour Emmanuel Macron…

Disponible en version brochée sur papier (116 pages – 10€ ) :  

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Dimanche prochain, #QuelquesPas…

Conseiller municipal de Boulogne-Billancourt, j’ai l’honneur de faire partie des grands électeurs qui voteront dimanche 24 septembre lors des élections sénatoriales. J’ai quitté le Parti Socialiste en juin dernier et ai depuis repris toute liberté de vote.

Je n’en reste pas moins fidèle aux valeurs de justice sociale et d’émancipation humaine sur lesquelles j’ai depuis toujours fondé mes engagements. Chef d’entreprise, j’accepte les principes d’une concurrence réellement libre, non faussée, régulée, et je revendique une certaine liberté sans pour autant défendre ni le libéralisme échevelé ni le laisser-faire économique.

Comme en 2012, le début de ce quinquennat est émaillé de réformes volontaristes, mais aussi de couacs, d’atermoiements et de traces d’amateurisme amplement relayés par les media.

J’observe attentivement les actions engagées depuis juin dernier par le Président et le nouveau gouvernement. Dans l’ensemble l’analyse de la situation et des facteurs de blocages de notre société est pertinente. Toutefois, quelques postures inquiétantes et quelques orientations idéologiques exigent une attention et un recadrage immédiats.

 

1 – Certaines déclarations du Président

Ses dernières sorties sur « les feignants » pour n’en citer qu’une, sont inutiles et contre-productives. Elles nuisent non seulement à sa popularité mais surtout à la crédibilité à l’efficacité des actions entreprises. Qui plus est, ces déclarations sont émises lors de voyages officiels à l’étranger. Autant j’ai approuvé le discours prononcé en Pologne sur l’Europe et les travailleurs détachés, autant j’ai désapprouvé celles sur les réformes. Le Président le sait pour avoir été dans le système et à Bercy suffisamment longtemps : ce sont certains hauts-fonctionnaires, lobbies et syndicats qui constituent des obstacles aux réformes, pas « le peuple ». Ce genre de déclaration doit cesser.

 

2 – Les premières réformes  : « moralisation de la vie publique » et « travail – dialogue social »

Sur la moralisation : l’interdiction d’employer un proche est une mauvaise réponse à un vrai problème. Le problème étant le caractère fictif des emplois, et non leur côté familial.

Sur la loi travail : Dans l’ensemble, le contenu des ordonnances est de nature faciliter la vie des entrepreneurs, en particulier en TPE/PME, plus qu’elle ne va faciliter l’embauche. La création d’emploi n’est pas liée à une prétendue facilité à licencier. Elle est avant tout dépendante du carnet de commande et de la capacité à trouver les bonnes compétences. La prééminence qui semble demeurer pour les branches va dans le bon sens, en revanche la barémisation des dommages et intérêts pour licenciement abusif est une mesure largement idéologique, qui absout et encourage une absence de management réel des salariés.

 

3 – Les dotations aux collectivités territoriales et les contrats aidés

Des mesures ont été prises brutalement et provoquent un tollé au sein des collectivités locales. A l’approche des élections sénatoriales on aurait pu être plus subtil. La baisse des dotations fournit du petit lait aux maires clientélistes qui ne manquent pas une occasion de fustiger ces baisses, tout en se lamentant dans les media de la trop forte part des dépenses publiques dans le PIB. La posture trop libérale de Bercy doit être rééquilibrée au profit d’un renfort de l’Etat stratège et d’un soutien aux investissements productifs, en commençant par un recours massif à la commande publique pour soutenir l’innovation et le « Produire en France » ainsi que l’activité des TPE/PME locales.

 

4 – La tenue du groupe parlementaire

Les media se sont repus durant juillet des atermoiements ou des flottements affichés par certains députés nouvellement élus et laissés à leur sort par un président de groupe étrangement absent. Tout cela est dorénavant passé et n’est pas si grave à condition que ces dérives soient rapidement recadrées. En revanche, députés tabasseurs, grandes gueules, filous ou magouilleurs n’ont rien à faire au parlement et des dispositions doivent être prises pour les en écarter rapidement, même si ce n’est pas juridiquement aisé.

 

Il me parait toutefois essentiel, pour le bien de notre pays et de ses habitants, que le social-libéral soit autant social que libéral, que les réformes engagées le soient de façon concertée, raisonnée, et en fin de compte aboutissent. La meilleure façon d’y parvenir après trente ou quarante ans de crise pourrait être de donner les moyens à cette majorité, ce gouvernement et ce Président de réussir. Laissons-leur cette chance, au moins pour quelque temps.

André Gattolin, sénateur sortant, est un homme compétent, intègre et sincèrement de gauche. Parmi ses colistiers et ses soutiens figurent des élus socialistes unanimement reconnus et appréciés. Des engagements clairs sur de nécessaires réformes (statut de l’élu local, simplification du « millefeuille administratif »), une volonté de soutien au développement des PME ainsi qu’à Economie Sociale et Solidaire animent cette liste aux origines politiques diverses.

Au-delà de la réforme, discutable, de l’ISF, des choix seront arrêtés lors du projet de loi de finances 2018 et des réformes sont annoncées pour le printemps prochain en complément de la Loi Travail. Ces mesures seront déterminantes pour l’avenir de notre économie productive et devront moderniser notre modèle social sans l’abîmer.

Aussi, après mûre réflexion, malgré les réserves exprimées plus haut, et sans pour autant me mettre « En Marche », je voterai Dimanche prochain pour la liste menée par André Gattolin . Ce vote est un encouragement aux transformations de la vie économique, sociale et politique de notre pays, et en même temps, il est un appel à ce que ces réformes soient réfléchies, concertées, mesurées, et à ce que les erreurs récentes du début de ce quinquennat ne se reproduisent pas.

J’ai toute confiance en la capacité d’André Gattolin et de ses colistiers à contribuer à ces changements et à leur régulation dans le respect de nos valeurs communes.

#LoiTravail : halte aux postures, place à la réflexion !

Le Président nouvellement élu avait annoncé durant sa campagne électorale qu’il réaliserait la réforme du droit du travail en procédant par ordonnances.

Certains au Parti Socialiste, que j’ai quitté en juin dernier pour en avoir été considéré comme démissionnaire, s’opposent aujourd’hui en bloc à cette réforme, sur le fond comme sur la méthode employée.

Cela appelle plusieurs commentaires.

Le recours aux ordonnances.

Nous avons passé une bonne moitié du quinquennat Hollande à nous plaindre du fait que le Président, sa majorité et ses gouvernements successifs s’éloignaient du programme sur lequel ils avaient été élus. Nous sommes devenus frondeurs et sommes depuis accusés des pires maux, dont celui de la responsabilité des défaites du printemps dernier. D’une façon générale, nous ne perdons pas une occasion de fustiger « les politiques » qui tournent le dos à leurs promesses.

En 1981/82 lorsque François Mitterrand et Pierre Mauroy ont mis en place, par ordonnances, les 39 heures, la 5° semaine de congés payés, la retraite à 60 ans, le remboursement de l’IVG et quelques autres des 110 promesses, je n’ai pas souvenir que nous ayons protesté ou hurlé au déni de démocratie.

On a reproché au Président sortant de n’avoir pas appliqué ses promesses, on ne peut en vouloir au nouveau de chercher à mettre en œuvre les siennes rapidement.

Le fond de la réforme.

Certains points de cette réforme sont négatifs et discutables : la barémisation des dommages et intérêts pour licenciement abusif, mesure idéologique et démagogique, en est l’exemple le plus emblématique. Je m’en suis déjà expliqué ici .

Les inquiétudes que nous pouvions ressentir sur l’inversion de la hiérarchie des normes pourraient s’estomper. Certaines conventions collectives sont assez rigides aussi, vu du patron d’une TPE de 10 personnes que je suis, pouvoir organiser entre nous le temps de travail, les temps partiels ou autres n’est pas forcément une mauvaise chose. Attendons d’en savoir plus sur les décrets d’application pour nous prononcer.

Un autre point mobilise les manifestants : la fusion du CE (Comité d’Entreprise), du CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail) et des DP (Délégués du Personnel) en une instance unique (Conseil Social et Economique). Euh…, chers camarades, en 2015, la loi Rebsamen sur le dialogue social a autorisé cette fusion en une seule « Délégation Unique du Personnel » dans les entreprises de moins de 300 salariés, et cela n’a ému personne. Cette même année puis de nouveau en 2016, la Commission Nationale Entreprise et son groupe TPE/PME dont j’étais le secrétaire, a publié deux séries de propositions visant à généraliser cette disposition, le tout étant approuvé en Secrétariat National. A ces réunions étaient présents certains, dont je tairai les noms par charité, à l’époque pro-Valls, pro-ElKhomri voire pro-Macron, et qui aujourd’hui se répandent en trémolos dans les media sur la disparition du CHSCT.

Halte aux postures de circonstance !

Cette séquence électorale laisse le PS dans un état comparable à Saint-Martin au lendemain du cyclone Irma. Je compatis avec le désarroi de mes ex-camarades de parti qui doivent retrouver une raison d’exister et ne peuvent qu’adopter une posture contradictoire avec celle affichée il y a encore quelques mois. Mais ce n’est pas ainsi, en faisant du sous-Mélenchon, que vous y parviendrez.

Prenez le temps de la réflexion, venez visiter des entreprises, leurs salariés, leurs cadres et leurs patrons, mettons la pression sur le MEDEF et la CPME pour que leurs adhérents embauchent maintenant que les « freins sont levés », mettons la pression sur le gouvernement pour moins d’austérité et plus de relance par l’investissement productif. Et nous reparlerons de tout cela.

 

 

Inversion de la hiérarchie des normes : un danger pour les TPE-PME

L’un des points clés de la réforme du droit du travail est ce que l’on dénomme communément « inversion de la hiérarchie des normes ». Cela signifie que l’accord d’entreprise l’emporterait sur la convention collective ou l’accord de branche dans de nombreux domaines : organisation du travail, horaires, voire rémunérations et conditions de licenciement.

Il est très difficile d’y voir clair tant certains thuriféraires de cette réforme, autant que certains jusqu’au bout-istes prétendument insoumis nous prédisent le pire si la situation reste en l’état ou si cette réforme voit le jour. A noter que vraisemblablement, très peu d’entre eux n’ont durablement travaillé dans une entreprise privée.

Certains grands groupes multinationaux sont, de par leur volume d’affaire et leurs effectifs, bien plus importants que certaines branches. Et ils disposent en leurs sein des compétences juridiques et d’Institutions Représentatives du Personnel permettant au dialogue social d’y exister efficacement. Aussi n’est-il pas incongru de leur laisser une certaine marge de manœuvre en la matière, tant que le principe l’égalité de notre constitution n’est pas bafoué.

L’hypothèse s’une primauté donnée à l’accord d’entreprise en TPE/PME appelle en revanche trois commentaires :

  1. En premier, un problème de faisabilité : un parton de TPE/PME est très opérationnel au quotidien, il est au contact permanent de ses collaborateurs, il a d’autres priorités que de s’embarquer dans une négociation sociale spécifique. De plus, il n’en a pas toujours les compétences en matière juridique et s’il doit s’entourer d’avocats pour entreprendre de telles négociations, cela va représenter un coût non négligeable. Risque de s’en suivre des pertes de temps pour des résultats susceptibles d’exposer négativement l’entreprise.
  2. En deuxième, une telle inversion entrainerait en TPE/PME un certain déséquilibre du rapport de forces entre le patronat et les employés, avec les craintes ou les risques de pression et de chantage que l’on imagine, et les risques délétères en matière de qualité de vie professionnelle et de burnout. Ce ne serait bon ni pour le moral, ni pour les performances.
  3. En troisième cette disposition entraînerait nécessairement à terme des disparités sociales d’une entreprise à l’autre, distordant la concurrence et créant le contexte pour des pressions des donneurs d’ordres à plus de dumping social.

A noter enfin qu’une récente étude de l’INSEE a montré que le code du travail n’est pas le principal « frein à l’embauche ». « Les embauches sont freinées par l’incertitude sur la situation économique (barrière citée par 28% des entreprises), la difficulté à trouver de la main d’oeuvre compétente (27% des entreprises), un coût de l’emploi jugé trop élevé (23% des entreprises) et par la réglementation du marché de l’emploi (18% des entreprises) », indiquent les auteurs de la note.

Donc attention, danger, halte au dogmatisme, place au pragmatisme !

Il convient pour autant de permettre aux normes sociales d’évoluer intelligemment :

  • Par une gouvernance offrant plus de place à l’actionnariat salarié et à la participation des salariés au sein des instances CA, Conseil de Surveillance, Conseil de rémunérations…
  • Par une rationalisation et un regroupement des seuils sociaux, en en réduisant le nombre et en dédramatisant les effets de franchissement ;
  • Par une possibilité de recours raisonnable au forfait jours favorisant l’autonomie des salariés tout en protégeant leur charge de travail ;
  • Par un renforcement du pilotage managérial intégrant des conditions préalables non abusives d’éventuel licenciement.

Interdiction d’employer un proche comme assistant parlementaire : une réponse démagogique et inefficace à des abus inadmissibles.

Ces derniers temps, le grand public a découvert avec stupeur que certains parlementaires avaient employé leur épouse ou leurs enfants entant qu’assistants, et que certains de ces emplois seraient fictifs.

On a aussi découvert que d’autres parlementaires employaient ou avaient employé en tant qu’assistants des individus exerçant en fait des fonctions de permanent au sein de leur parti politique. Deuxième série de soupçons d’emplois fictifs.

 

Quel est le point commun entre ces deux abus ? la parentalité ou la non-réalité, la fiction de l’emploi ?

Pour éviter ces abus, que veulent proposer le ministre de la justice et le nouveau président ? Interdire l’emploi de proches (conjoint, concubin, enfant…) comme assistants parlementaires.

Réponse spectaculaire et démagogique, autant qu’injuste, potentiellement contournable et inefficace. Pourquoi ne pas carrément imposer le célibat aux parlementaires et leur interdire de procréer ou de prendre amants/maîtresses ? Ainsi, plus de risque de conflit de nature familiale.

Soyons sérieux. Ces abus proviennent depuis des décennies d’une situation de laxisme, de gabegie et d’incompétence que seul l’État peut s’autoriser, et qu’on ne rencontrerait jamais en entreprise.

La vie de parlementaire est exigeante et très exposée, nul ne le conteste. Un député ou un sénateur partage son temps entre les palais parisiens et sa circonscription / son département (qui souvent inclut la ville dont il est maire, mais dorénavant cela est terminé avec la fin du cumul des mandats). Lorsqu’il n’est pas élu d’Ile de France, cela signifie qu’il partage sa vie entre Paris et la Province. C’est le cas de nombreux travailleurs du privé mais ce n’est pas pour autant agréable. Donc au final, il est dommage de priver un parlementaire d’une possible collaboration avec son conjoint et d’introduire ainsi une discrimination au recrutement. Est-ce constitutionnel d’ailleurs, en regard des principes d’égalité et de droit au travail ?

Mais le fond du sujet n’est pas là. Parlementaire et assistants sont des travailleurs comme les autres et à ce titre :

  • D’une part ils doivent justifier leurs dépenses en en conservant les justificatifs, comme tout travailleur et tout chef d’entreprise.
  • D’autre part les emplois d’assistants doivent être encadrés, par une convention collective explicitant niveaux de compétences et de rémunérations, par un contrat de travail stipulant missions à remplir, salaire annuel, horaires à respecter etc.

Et enfin comme bon nombre de travailleurs dans les usines, les bureaux d’études, les agences bancaires, les services informatiques etc. l’assistant doit être assujetti à un encadrement du temps de travail. Cela peut se matérialiser par un reporting mensuel via un intranet ou par un système de badge informatisé permettant de tracer les entrées/sorties de l’assistant et d’attester ainsi mois après mois de sa présence, de la réalité du travail accompli et de la quantité d’heures ou de jours qui y a été consacrée. Fin de la fiction.

En résumé, laissons les parlementaires embaucher qui ils veulent comme assistants, mais donnons au système les moyens de tracer la réalité des emplois confiés.

 

 

Barémisation des indemnités pour licenciement abusif : une solution facile et injuste en réponse à un faux problème.

La perspective de dommages et intérêts importants accordés à un salarié licencié par le tribunal des prud’hommes constitue pour une TPE ou un PME un risque financier conséquent. Ce risque serait de nature à freiner l’embauche. Le prétexte invoqué par le gouvernement pour cette barémisation est une limitation de ce risque financier.

On en vient à traiter par cette barémisation l’ultime conséquence d’une séparation qui, si elle avait été correctement conduite, ne se serait pas dégradée à un tel point.

Que se passe-t-il dans la réalité ?

Prenons un cas usuel : Un collaborateur est installé dans son travail. Avec le temps parfois, et quelles qu’en soient les raisons, sa performance se dégrade, les dérives (retards, absences, manquements, négligences, incivilités, conflits …) deviennent de plus en plus fréquentes et la situation commence à se dégrader. Arrive le moment où le dirigeant décide que cela suffit et qu’il faut que cette personne quitte l’entreprise.

Faute de parvenir à s’accorder sur une séparation amiable via une rupture conventionnelle, le chef d’entreprise licencie alors son employé, plus ou moins adroitement et plus ou moins brutalement. L’exemple usuel est celui d’une faute, lourde ou grave, invoquée ou inventée pour procéder sans ménagement au licenciement.

Le salarié congédié décide ensuite d’attaquer son employeur aux prud’hommes pour licenciement abusif. Il arrive que les prud’hommes requalifient le licenciement « sans cause réelle et sérieuse » et accordent à l’employé une indemnisation compensatrice conséquente.

Bien sûr, il est des salariés qui profitent de leur situation et abusent d’un comportement inacceptable, mais ceux-là donnent suite en général à une proposition de rupture conventionnelle.

 

Est-il pour autant nécessaire de plafonner ces indemnités ?

La responsabilité d’une situation devenue délétère en revient à l’employeur. En effet lorsqu’on recrute un collaborateur, on s’engage à :

  • Lui fournir un travail
  • Lui verser un salaire
  • Le former

Mais ce n’est pas tout. Le devoir d’un employeur, c’est aussi de manager ses collaborateurs.

Et c’est souvent ici que le bât blesse. Prétextant un manque de temps, une charge opérationnelle élevée ou d’usuelles « tracasseries administratives », trop de petits patrons voire de prétendus « managers » … négligent le management.

Ou plus exactement, faute de repères ou de compétences, ils ne savent pas trop comment s’y prendre. La proximité et la convivialité, réelles en TPE-PME, occultent la nécessité d’un pilotage formel et régulier de tous les collaborateurs.

 

Comment organiser le pilotage des collaborateurs ?

En synthèse, un pilotage équilibré porte sur les performances autant que sur les compétences et les comportements, et alterne séquences collectives et temps individuels.

Parmi les séquences collectives, nous trouverons la traditionnelle réunion plénière de fin ou de début d’année, les réunions régulières de service (hebdomadaires, mensuelles ou bi/trimestrielles selon les contextes), et des réunions ponctuelles de lancement de nouvelles activités ou de gestion de crise…

Premier élément de pilotage : certains temps de ces séquences devront porter sur des éléments de cadrage réglementaire ou comportemental : horaires, port des EPI, respect de normes techniques, courtoisie etc.

Parmi les temps individuels figureront :

  • L’entretien professionnel (rendu obligatoire par la loi du 5 mars 2014), biennal ou en des circonstances précises (retour de maladie etc.),
  • L’entretien annuel d’évaluation, facultatif dans le cas général, obligatoire pour chaque salarié soumis au forfait-jours. Deuxième élément de pilotage : dans sa partie consacrée au passé, cet entretien doit impérativement porter non seulement sur les résultats mais aussi sur les écarts constatés entre ce qui était attendu et ce qui s’est passé. Troisième élément de pilotage, dans sa partie consacrée à l’année qui vient, cet entretien doit détailler de façon explicite les « exigences » de son manager, à savoir comment il contribue à la bonne marche des affaires et ce qui est attendu de lui en matière de comportement, d’évolution de compétences etc.
  • Des entretiens et autres points bilatéraux plus ou moins planifiés et réguliers.
  • Des entretiens non-planifiables résultant de nécessités de service (affectation à une nouvelle tâche, retour de formation …) ou de circonstances exceptionnelles (félicitations, recadrage, crise, conflit, « coup de mou » …)

C’est l’absence de ces deux derniers types d’entretien, la maladresse ou la négligence avec laquelle ils sont conduits, qui engendre les situations délétères évoquées plus haut et qui sont susceptibles de mener à un licenciement conflictuel, faute de savoir procéder autrement. C’est souvent le manque de compétence, ou le manque de courage, ou les deux, qui font qu’un entretien de recadrage n’est pas mené et qu’on laisse ainsi la situation s’envenimer.

 

Il manque dans cette palette un type d’entretien, un quatrième élément de pilotage, parfois appelé entretien séquentiel de pilotage. Pour faire simple, il s’agit d’un « mini entretien annuel », « plusieurs fois par an » ! Cet entretien peut se dérouler tous les 3 à 4 mois. Il est d’autant plus justifié que dans la conjoncture actuelle, circonstances économiques et priorités peuvent changer en un année. Cet entretien porte sur les travaux accomplis, les difficultés rencontrées, les résultats obtenus, les comportements affichés, les nouvelles priorités le cas échéant. Il doit faire l’objet d’un compte rendu écrit stipulant les points positifs et négatifs. Parmi ces derniers doivent figurer des alertes, recadrages ou avertissements constitutifs si nécessaire, le moment venu, d’un dossier de licenciement ainsi étayé en bonne et due forme. Un tel licenciement ne court quasiment aucun risque d’être requalifié comme abusif.

 

En conclusion, pour réduire le risque de dommages et intérêts en compensation d’un licenciement abusif, il faut avant tout éviter de créer des conditions abusives de licenciement. Pour cela il convient tout d’abord d’éviter que la situation se dégrade insidieusement, en identifiant les écarts et en exprimant d’éventuelles mises en garde par un pilotage précis et régulier des collaborateurs.

Qui plus est, un pilotage régulier ne peut qu’accroître le niveau de motivation et de performance des collaborateurs, ce qui ne peut être que bénéfique pour l’entreprise.

La mesure efficace et novatrice serait donc de rendre obligatoire l’entretien séquentiel de pilotage.

Il serait dommageable et contre-productif d’encourager un certain laxisme et de permettre à des entrepreneurs s’affranchir de leur devoir de management en instituant cette garantie d’une indemnisation plafonnée en cas de licenciement abusif.

NB : Dans ma vie professionnelle, j’ai toujours consacré un temps notoire à ce pilotage. J’ai eu à me séparer d’un certain nombre de salariés, sans jamais perdre aux prud’hommes.

Et qu’on ne vienne pas nous dire que mener de tels entretiens est chronophage, que c’est une tracasserie de plus ou que je ne sais quoi. Un patron, petit ou grand, un manager qui n’a pas le temps de passer une heure trois ou quatre fois par an avec chacun de ses n-1 ne mérite ni son poste, ni son statut. Qu’il redevienne alors simple salarié ou qu’il s’installe en indépendant.

La Vague : comment le quinquennat Hollande a sabordé le PS


Historiquement, il y a depuis les années 1920 deux tendances socialistes, celle de Jules Guesde et celle de Jean Jaurès, la première étant plus « radicale » que la seconde. La première fut incarnée par Chevènement, Mélenchon, Aubry, Montebourg, Hamon. La deuxième par Delors, DSK, Rocard, Hollande, Macron. On a retrouvé cette opposition idéologique lors de chaque congrès du PS puis lors des primaires en 2011 comme en 2017.

La victoire de Hollande à la primaire de 2011, puis à l’élection présidentielle de 2012, s’est jouée sur une contradiction et sur un compromis.

  • Une contradiction car les prétendants à la primaire étaient tenus au respect d’un programme socle concocté par le PS de l’époque, dirigé par Martine Aubry.
  • Un compromis car Montebourg a choisi de soutenir Hollande plutôt qu’Aubry au deuxième tour de la primaire, estimant que cette dernière ne serait pas en mesure de battre Sarkozy.

D’où la victoire de Hollande, acquise sur l’ambiguïté idéologique d’un projet sur lequel ses propres convictions n’étaient pas alignées. Ses renoncements futurs devenaient alors quasiment inéluctables.

C’est ce que qui a inspiré en 2013/2014 ce « tournant libéral » ayant maintenu une certaine austérité budgétaire, ayant privilégié une politique de l’offre pour aboutir en 2016 à une évolution libérale du code du travail. Hollande avait parfaitement le droit de vouloir demeurer fidèle à ses convictions profondes mais pour légitimer ce revirement il aurait pu, il aurait dû sans doute :

  • L’annoncer clairement 12/18 mois après son accession au pouvoir, arguant du contexte économique de l’époque, de la situation laissée par Sarkozy et des contraintes imposées par l’Union Européenne ;
  • Le légitimer pleinement en dissolvant l’Assemblée Nationale et en demandant aux Français de se prononcer.

Il a choisi de ne pas le faire car fin 2013, après un an et demi de politique fiscale erratique menée par Ayrault et Moscovici, il savait pertinemment que la défaite aurait été cinglante.

Ensuite, il y a eu chez les socialistes durant le reste du quinquennat deux puis quatre attitudes.

D’une part, les légitimistes, ceux qui estiment qu’un parti et que ses militants doivent, par devoir, soutenir ses dirigeants et ses élus. Ceux-ci, vaillamment ont défendu les positions du gouvernement quelles qu’elles soient. A noter qu’il en est parmi eux qui se reconnaissent dans la gauche socio-libérale et qui se trouvaient donc idéologiquement confortés par cette posture.

D’autre part, les « loyalistes », ceux qui s’estimaient, en regard d’eux-mêmes comme des électeurs de gauche, obligés par le programme sur lequel avait été élu François Hollande (discours du budget, 60 engagement, programme socialiste aux législatives). Ceux-là sont devenus « frondeurs » après les municipales de 2014 lorsqu’il est apparu que le nouveau gouvernement Valls adhérait pleinement à la politique austéritaire et libérale voulue par le Président (conseillé et conforté dans cette voie par Macron).

A partir de 2015/2016. Ces deux courants se sont à nouveau scindés :

  1. Certains « socio-libéraux » trouvant que le gouvernement n’en faisait pas assez, ont quitté le PS pour rejoindre En Marche : cela les a conduits à une victoire éclatante, au-delà peut-être de leurs propres espérances.
  2. D’autres « socio-libéraux » sont restés au PS, par devoir militant, par discipline gouvernementale ou par calcul électoraliste. Qu’ils aient fait loyalement campagne pour Hamon ou qu’ils soient restés silencieux, cela les a conduits à l’échec.
  3. La plupart des « frondeurs » a tenté jusqu’au bout d’infléchir la politique du gouvernement, de réformer le PS de l’intérieur, a réitéré et médiatisé sa loyauté au programme de 2012, en a fait sa stratégie électorale pour 2017 et pour l’après-Hollande. Ils ont fait campagne pour Hamon, cela les a conduits au même échec que les loyalistes, la plupart des électeurs ne faisant pas la différence entre ces deux tendances du PS. J’en ai fait partie pour avoir soutenu depuis 2003 les initiatives réformatrices et innovantes de Montebourg, j’assume pleinement tant mes choix que ma modeste part de responsabilité.
  4. Les plus démotivés des frondeurs ont quitté le PS pour rejoindre Mélenchon : ils en retirent une illusion de quasi-victoire.

On a observé un phénomène similaire à droite, les querelles d’ego et les magouilles Copé-Fillon puis Fillon en solo occultant les questions idéologiques. A noter toutefois que certains, sous l’impulsion de LeMaire/NKM/Solère, tentent de faire émerger une droite plus progressiste que la droite dure proche de Sens Commun et du FN. Ils sont dans leur parti comparables aux socio-libéraux du PS et à ce titre se rapprochent d’En Marche.

Pendant tout ce temps, le Parti Socialiste en tant qu’institution nationale a été muet, inerte, indigne. A aucun moment ses premiers secrétaires, Désir ou Cambadélis, n’ont rappelé le gouvernement ou le Président à ses engagements. Tout juste ont-ils été capables de déclarations mi-chèvre mi-chou, de tout petits coups de menton ou de discours compassés pour se donner le sentiment d’exister encore un peu. Martine Aubry a laissé penser un temps qu’une réaction était envisageable, avant de renoncer et de se rallier à la majorité gouvernementale lors du congrès de 2015. La direction nationale n’a même pas été capable de produire un projet électoral pour 2017, et s’est fait longuement tirer les oreilles par ses militants pour organiser une élection primaire à laquelle ses statuts l’obligeaient pourtant. Sourd aux alertes venant du terrain depuis 2013, laissant ses fédérations à leurs petites manœuvres locales, impuissant face à quatre cuisantes défaites électorales en 2014/2015, dépourvu de projet, le PS s’est regardé sombrer.

En synthèse, socialistes légitimistes et loyalistes (frondeurs) ont fait la même erreur stratégique, celle de soutenir ou de s’opposer via le PS, ses structures, ses courants, ses motions et ses alliances avec des partis historiquement partenaires : PRG, UDE, EELV. Par conformisme ou par attachement à leur parti, ils n’ont été capables ni d’en dépasser le cadre, ni de le réformer en profondeur. Tous ont été emportés par une même vague dimanche dernier.

 

D’autres, fatalistes, visionnaires, courageux ou opportunistes se sont émancipés du PS pour partir chez Mélenchon ou chez Macron. Et ce sont au final ceux qui ont rejoint ce dernier qui ont tiré les marrons du feu.

 

Pour n’avoir pas soutenu dans la 9° circonscription des Hauts-de-Seine une candidate partenaire isséenne UDE désignée par le Parti Socialiste, j’en suis, aux termes d’une lettre publiée par Cambadelis le 31 mai dernier, « réputé démissionnaire ». Ce verdict ne faisant que d’anticiper ma décision, je l’accepte et confirme ma démission.

Je ne me reconnais pas dans le radicalisme idéologique et dans le sectarisme de Mélenchon. Tant la vocifération que la sortie de l’Union Economique ne s’inscrivent ni dans mes valeurs, ni dans mes convictions.

Les dés étant jetés, on ne peut que souhaiter la réussite de Macron et de sa majorité, mais je ne me sens pas enclins pour autant à rejoindre En Marche. La réforme du code du travail est nécessaire mais elle devra être très finement menée pour réussir. En tant qu’entrepreneur je m’y intéresse au premier chef, tout en ayant déjà signalé par exemple les multiples dangers de la négociation d’accords d’entreprises en TPE-PME ou de la barémisation des indemnités pour licenciement abusif. Sur ce point, les déclarations de la ministre du travail traduisent une réelle maîtrise du sujet et sont encourageantes.

Le recours aux ordonnances ne me chaque pas outre-mesure. On a reproché au président sortant de n’avoir pas appliqué ses promesses, on ne peut en vouloir au nouveau de chercher à mettre en œuvre les siennes rapidement. Tout dépendra du fond et du niveau de consensus social obtenu.

La relance par l’investissement productif, la résorption du chômage et de la précarité, la moralisation de la vie publique, la lutte contre l’évasion fiscale, l’intégration des jeunes dans la vie active et une moindre austérité notamment à l’hôpital sont à mon sens les sujets prioritaires et concomitants à la nouvelle loi travail afin de crédibiliser l’ensemble des premières réformes.

 

Entre LFI et EM, existe-t-il encore une nécessité et subsiste-t-il encore un espace politique alternatif, pour un mouvement économiquement innovant, socialement responsable, écologiquement raisonnable, pro-européen, positionnant l’Etat à une place équilibrant interventionnisme, sécurité, libertés, et capable de réguler les excès du capitalisme financier ? C’est ce que n’a pu bâtir Montebourg, c’est ce que veut tenter Hamon, nous verrons.