Chronique de la rupture #74 ? Février 2011

Le carnaval des poly-tocards

 

Ils sont politicards et ne pensent qu'à leurs intérêts, ils sont tocards tant ils s'embrouillent dans leurs explications : bienvenue au carnaval des polytocards !

 

Pour paraphraser Coluche ? et le faire mentir :

Question : Quel est le mois où les sarkozystes font le moins ce conneries ?

Réponse : Février les années non bissextiles, parce qu'il n'y a que 28 jours?

 

Nous craignions tous qu'il se présidentialise, prenne du recul voire de la hauteur (au sens figuré), à l'approche des cantonales et en vue de la présidentielle de 2012. Nous nous demandions si la vie en Sarkozye n'allait pas devenir fade, limite ennuyeuse. J'appréhendais l'angoisse de la feuille blanche au moment d'écrire cette chronique mensuelle. Sauvés !

 

Dès le début du mois, ce sont les CRS qui descendent dans la rue pour manifester leur mécontentement. Au moins, ils sont sûrs de ne pas se faire taper dessus.

 

Puis le duo magique Fillon/Copé tente une percée à droite autour de la TVA et des charges sociales pesant sur les entreprises.

 

Dans un discours prononcé à Orléans le 3 février, Sarkozy entonne à nouveau la chanson de la compassion et attaque frontalement la magistrature à propos d'un fait divers dramatique et du « présumé coupable » :  « Lorsqu'on laisse sortir de prison?. C'est une faute ».

 

Tollé au sein de la magistrature, qui relève la mise en cause injustifiée et dénonce l'instrumentation :

  • L'enquête administrative n'est pas terminée, le suspect était sorti régulièrement de prison après avoir purgé des peines, et il n'avait pas été condamné pour des faits criminels.
  • Les manques de moyens ont déjà été signalés à plusieurs reprises : Il manque 1000 juges d'application des peines, 8 seulement ont été embauchés ces trois dernières années.

« Que du pipo » déclare le Juge Marc Trévidic sur France Info.            

S'ensuivent des manifestations et des grèves du zèle dans tout le pays. Quelque temps plus tard, le rapport publié à l'issue de l'enquête montrera qu'il n'y a pas eu de faute commise par les magistrats, ce qui n'empêchera pas le Président de muter le directeur régional de l'administration pénitentiaire.

 

Nouvelles manifestations des enseignants qui protestent contre des suppressions de postes injustifiées.

 

Vient la semaine suivante la pantalonnade télévisuelle « Paroles de Français », complaisamment animée par JP Pernaud, alors même qu'au Caire le régime Moubarak vit ses dernières heures.  2h30 de quasi monologue (z'avez vu comme j'suis bon hein, on avait prévu 1h30), de propos arrangés, pré-formatés, sensés occulter la réalité et faire croire à tout ce qui n'a pas été fait. Une vraie réussite : 70 % des téléspectateurs ne sont pas convaincus, 10% n'ont pas d'opinion, 20% y croient encore.

 

Au Mexique, une française est condamnée à 60 ans de prison. Sarko, sombre héros, bombe le torse et affirme que puisque c'est comme ça, l'année du Mexique en France sera placée sous le nom de la ressortissante emprisonnée. Réaction immédiate du gouvernement mexicain qui annule sa participation aux évènements prévus. En conséquence, 300 expositions sont affectées voire annulées dans toute la France, il en coûte de l'ordre de 20 Millions d'Euros.

 

Tous les jours, la presse se fait l'écho des déboires et des explications embarrassées de la Ministre de la défense Michèle Alliot-Marie, alias MAM, rapidement surnommée « Maladresse Après Maladresse » et autres sobriquet par les chroniqueurs qui s'en donnent à ch?ur-joie.

 

En décembre, en pleine révolution tunisienne, MAM prétend avoir pris « par hasard »  à Tunis l'avion privé d'un ami local pour se rendre dans le Sud du Pays. A Noël , MAM erre, c'est bien connu. Idem au retour. Le hasard fait décidément bien les choses puisque cet ami, proche du dictateur déchu Ben Ali, était en affaires avec les parents de la Ministre, également du voyage. Dans le courant de ce mois, il est également révélé que la Ministre avait eu des contacts téléphoniques avec des officiels tunisiens. Rappelons qu'en janvier MAM avait proposé au régime en perdition l'aide de compétences françaises en maintien de l'ordre. Pour en finir avec le chapitre tunisien, le nouvel ambassadeur de France, un dénommé Boillon, voulant sans doute montrer que l'élève peut dépasser son maître (68), s'emporte en pleine conférence de presse, fustigeant les « questions débiles » de la journaliste et claquant la porte. « Boillon, dégage ! » reprennent aussitôt les ch?urs locaux dans la rue.

 

A la mi-février, le vent de révolte se soulève en Lybie, déclenchant une répression sanguinaire qui vaut à Khadafi d'être enfin mis au ban des nations. C'est alors que l'on s'aperçoit que les photos de la visite officielle du dictateur libyen, reçu en grande pompe par Sarkozy à l'automne 2007, ont disparu du site web elysée.fr (oups pardon, elles étaient rangées par erreur dans un autre album, tente-t-on de nous faire croire le soir même).

 

Quant au compagnon de la ministre, également secrétaire d'état, il préside une association d'amitié franco-libyenne proche de Khadafi.

 

Mexique, Tunisie, Egypte, Lybie : la voix de la France, pilotée depuis l'Elysée, est inaudible ou ridicule. Des diplomates courageux s'en émeuvent et, sous le com collectif de Marly, publient dans le Monde une tribune où ils fustigent l'improvisation, l'impulsivité et l'amateurisme du Président.

 

Une broutille au passage, mais qui témoigne tant du caractère irréprochable de la république sarkozyste. Le premier ministre Fillon a affrété un jet pour se rendre en week-end dans la Sarthe à deux heures de route de Paris. Coût de l'opération : 27 000 Euros.

 

C'en est trop pour Dominique de Villepin qui décide de rendre sa carte de l'UMP. 

 

Sur ce, le 28 février, Sarko, faux dur qui a trop attendu, se décide enfin à limoger MAM, et la remplace par Juppé qui va tenter de remettre un peu de dignité dans tout cela. Hortefeux, par deux fois condamné, passe à la trappe par la même occasion.

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A 20 heures le dimanche 27, il s'adresse à la nation. Un discours au lyrisme digne d'un besogneux étudiant de terminale, nous brosse un panorama de la situation de l'Afrique du Nord pour en venir rapidement rapidement sur les risques migratoires et sur l'insécurité, histoire de justifier la mise au rencart des deux boulets susnommés. Le carnaval des poly-tocards touche à sa fin, jusqu'à la prochaine fois.

 

Dans le même mois, se mettre à dos la police, l'enseignement, la justice et la diplomatie de son pays, puis conclure en sauve-qui-peut par un remaniement ministériel : un véritable exploit, digne de figurer dans le livre des records. Mais que peut nous réserver mars ?

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