Un témoignage d’une blogueuse militante :
« Blogexperience » http://monblogessai.wordpress.com/
Je vais encore vous parler politique : samedi, j'ai franchi le pas !
De spectatrice plus ou moins active dans l'expression de mon opinion, je suis devenue participante. Un premier pas modeste, mais un pas en avant tout de même : je suis allée à une réunion des « parrains, mandataires et coordinateurs » de la campagne de Montebourg. A l'Assemblée nationale, s'il vous plaît.
Le coordinateur départemental (auprès duquel j'avais pris l'initiative de me signaler) m'avait informée de cette réunion. Comme il ne pouvait pas y assister, et que nous manquons de partisans actifs dans le département, il n'était pas incongru qu'une novice comme moi s'y rende.
Retour sur cette expérience dans les coulisses d'une réunion qui montre Arnaud Montebourg au travail, loin de son image médiatique.
? Mrs See Mee à l'Assemblée
Quelques choses à savoir sur l'observatrice ! Que vous compreniez « d'où je parle »?
Même si ma culture politique est relativement faible, j'apprécie le débat d'idées et m'intéresse à l'actualité? pour peu qu'elle traite des questions de fond plutôt que des tactiques d'appareils. Femme de conviction, je suis néanmoins trop respectueuse des opinions des autres pour ne pas relativiser les miennes. Je m'intéresse à tous les courants qui promeuvent l'intérêt général, la solidarité et la citoyenneté.
J'ai toujours voté (avec plus ou moins d'enthousiasme) pour les candidats du PS? avec une exception notable le 21 avril 2002, hélas. Incapable de trancher entre une vision optimiste et humaniste de la construction européenne et le refus d'un traité privilégiant les intérêts économiques au détriment du reste, j'ai voté blanc au référendum de 2005. Toujours prompte à m'exprimer et capable de me mobiliser sur des actions d'intérêt général, je n'ai pourtant rien d'une militante et percevrait comme une limitation de ma liberté le fait de m'encarter.
Bref, je crois que je correspond bien au profil-type de l'électeur de Montebourg? les « contestataires » les plus virulents mis à part, qui eux ne voteront pas PS au premier tour de la présidentielle. D'ailleurs, s'il n'y avait pas le risque de voir se reproduire un dangereux éparpillement des voix, qui sait si la mienne irait à Hollande ?
Comme je l'expliquais dans un précédent billet, c'est avec conviction que j'ai voté Montebourg. J'allais donc le retrouver parmi ses soutiens à l'Assemblée nationale avec plaisir? mais sans trop savoir à quoi m'attendre.
Je débarquais en terre totalement inconnue, sans appréhension, mais avec circonspection. Si les ors de la République ont quelque chose d'impressionnant, je me sentis rapidement à mon aise parmi la cinquantaine de participants*. Des individus de tous âges, mais pas mal de jeunes, voire de très jeunes. Même si la parité n'était pas parfaitement respectée, une proportion respectable de femmes. Un brassage social et « ethnique » visible. Peu de grosses personnalités politiques, mais pas mal de militants PS chevronnés. Une équipe de campagne qui ne cherchait pas à se mettre sur le devant de la scène.
J'ai écouté, j'ai pris des notes, j'ai filmé quelques extraits pour rendre compte au mandataire de mon département. Mais surtout, j'ai apprécié.
? Montebourg en réunion de travail
On sait que pour se hisser sur le devant de la scène, il faut avoir un sacré tempérament et une haute idée de sa personne? reproche récurrent fait à Montebourg. J'ai dans mon travail croisé pas mal de personnages politiques (jusqu'à des ministres) de tous bords. L'image qu'ils donnent d'eux-mêmes en représentation est parfois assez éloignée de ce que l'on peut ressentir lors d'un contact plus proche. J'avais déjà constaté l'écart entre les attitudes empruntées de Montebourg sur les plateaux de télé et un engagement plus naturel lors de ses meetings. Lors de cette réunion, ce fut encore plus flagrant. J'ai observé un homme très simple et pédagogique dans son expression, et très concentré dans l'écoute (il n'a pas monopolisé la parole, bien au contraire). Là, parmi les siens, il était posé, décontracté, sans afféteries.
Il a commencé par analyser sans ambages ce qui s'était joué pour lui dans l'entre-deux tours, reformulant l'explication qu'il avait déjà publiée sur son blog : promoteur de la primaire citoyenne, c'était selon lui de sa responsabilité de se prononcer pour l'un ou pour l'autre des finalistes. A fortiori après que ceux-ci aient pris la peine de répondre (voir la réponse de Hollande et celle de Aubry) à sa lettre, en s'engageant sur une partie de ses propositions. « Je ne pouvais pas m'en laver les mains», a-t-il justifié**. Il n'a mis aucune emphase quand il a dit avoir, en connaissance de cause, accepté une certaine « destruction d'image personnelle, dans l'optique de préserver un intérêt collectif» : pousser les finalistes à « aller chercher [ses] électeurs sur les sujets de fond, en enrichissant leur offre».
[Petite digression sur la relation paradoxale que nous entretenons avec les hommes et femmes politiques…] Nous leur reprochons leur ambition et leur approche stratégique, quand c'est pourtant le seul moyen de porter leurs idées au c?ur du débat public. Nous passons notre temps à supputer des tactiques et des accords en coulisse, mais nous ne parvenons pas à nous dépouiller de notre méfiance quand ils tentent de jouer cartes sur table (par exemple en « contractualisant » publiquement avec les « impétrants »). Certes, ne soyons pas naïfs ! Mais ne passons pas non plus à côté d'une tentative pour clarifier les règles du jeu. Encourageons-là, au contraire, sinon, comment cela pourra-t-il changer ? [/Fin de la digression].
? Faire de la politique autrement
Les représentants présents ont pu assez longuement faire part de leurs ressentis et analyses. Il ont bien sûr parlé du soutien à la campagne du candidat victorieux de la primaire, des thématiques qu'ils avaient envie de faire exister au sein du projet socialiste, du travail à réaliser pour dépasser la (nécessaire mais réductrice) simplification médiatique au sujet de la démondialisation.
Mais je me suis sentie plus particulièrement concernée quand ils ont pris le temps de relater leur expérience vis-à-vis des électeurs dans mon genre. Il a été question des aspirations pour une politique qui ne soit pas ramenée à des bagarres pour le pouvoir. D'un potentiel d'engagement à des degrés divers, qui ne soit pas entravé par la lourdeur des logiques d'appareil et une instrumentalisation des militants de base. De la manifestation d'une conscience politique sincère et volontaire, mais qui n'est pas toujours prête à s'exprimer au sein des partis, avec tous les obstacles que ceux-ci mettent sur le chemin de l'adhésion. De chercher à convaincre différents acteurs politiques, « tout en les respectant dans leurs choix». Et si possible, de contribuer à « faire surgir une nouvelle génération politique», qui propose des solutions en cohérence avec « les exigences populaires».
J'ai pu prendre la parole et apporter mon témoignage, à la fois comme « cobaye » de ces nouvelles formes d'engagement à construire, mais aussi, sans atténuer mon propos, sur les réactions observées sur le web concernant « le candidat Montebourg ». Incapable à ce stade de rentrer dans le moule, je n'ai pas joué du « Arnaud » et du « tu » comme tous ceux qui étaient présents (et l'ont accompagné en politique depuis longtemps pour certains) et j'ai préféré m'adresser aux gens de la salle plutôt qu'à leur chef de file. Malgré l'intimité de l'ambiance, il restait pour moi le mec que j'ai vu à la télé et que j'aimerais voir accéder à de hautes fonctions « s'il y a des échéances qui sont à un moment à portée de main».
? On ne va pas s'arrêter en si bon chemin
Montebourg et son staff ont proposé des dispositions pour l'avenir, en adéquation avec les remontées dont je viens de faire part. Bien que « Arnaud » (je vais finir par m'y mettre, ne serait-ce que pour limiter les répétitions !) ait insisté sur la liberté laissée aux militants de s'en saisir, d'être « chacun messager à sa manière»? je ne me sens pas encore assez légitime aujourd'hui pour les livrer en détail, en particulier en-dehors d'un travail de terrain. Vous aurez compris la ligne directrice, il s'agit de « défendre des idées et les diffuser dans la société, dans les partis politiques», sans présenter de candidats, mais en prenant des positions sur lesquelles interpeler ceux en lice, notamment aux législatives. Des outils*** ont été définis pour soutenir ce mouvement politique « dans et hors du PS», qui « doit pouvoir faire vivre par les actes l'esprit de la sixième république.»
Bien e
ntendu ce n'est pas la première fois que cela est tenté? sous d'autres formes, dans d'autres contextes. Je présume qu'ils ont analysé les failles d'une telle démarche. Peut-être aussi se disent-ils que c'est le bon moment, qu'ils sont en mesure de répondre à ces aspirations citoyennes qu'ils ont identifiées. Sans doute sont-ils convaincus que leur manière de procéder fera la différence. Cette réunion à laquelle j'ai participé le donne à penser : lucidité, dialogue, ouverture d'esprit étaient au rendez-vous.
Montebourg me semble vouloir entretenir cette dynamique pour de bonnes raisons. J'espère qu'il aura l'occasion de faire ses preuves au sein d'un gouvernement. J'espère aussi qu'il y aura toujours autour de lui des personnes pour lui parler vrai, pour maintenir le lien avec les préoccupations de la population.
En ce qui me concerne, je pense que réconcilier les français avec la politique est une priorité (voir mon billet sur Agoravox à ce sujet). Qu'instaurer un véritable dialogue constructif au sein de la nation est la clé pour affronter et résoudre nos problèmes. Je suis prête à y participer, à mon niveau, sur le web et près de chez moi. Et vous ?
* Un grand merci à tous les participants pour leur accueil, et tout particulièrement ceux qui m'ont emmenée au repas puis à la convention d'investiture !
** Les mots entre guillemets et en italique sont de Montebourg.
*** Edit : Arnaud Montebourg en dit plus dans un entretien accordé auJournal de Saône et Loire du mardi 25 octobre.