Chronique de la rupture #68 ? Juillet/Août 2010

Panique dans les talonnettes !

 

L'affaire Bettencourt-Woerth monte en puissance, on s'attend donc à des contrefeux censés détourner l'attention de l'opinion publique. Ouvrez le ban !

  • 1er juillet : « l'état réduit son train de vie » à la une de tous les media : nombre de collaborateurs et notes de frais des ministres, pas de garden party à l'Elysée, bla bla bla ; économies espérées : une fraction du manque à gagner résultant du bouclier fiscal ou de la baisse de la TVA dans la restauration
  • 4 juillet : Empêtrés dans plusieurs affaires où leur exemplarité fut prise en défaut, les secrétaires d'état Joyandet et Blanc démissionnent. Joyandet, personne ne le connaissait avant, tout le monde l'a déjà oublié. Christian Blanc, collaborateur de Rocard, pacificateur en Nouvelle Calédonie en 1988, sauveur d'Air France en 1993 égaré ensuite au centre puis à l'UMP, kouchnerisé au gouvernement, et qui tombe comme un minable magouilleur de fond de cour, une immense déception.
  • 10 juillet : publication d'un rapport de l'Inspection Général des Finances écartant tout soupçon d'Ingérence d'Eric Woerth, alors ministre du budget, dans le dossier fiscal de Mme Bettencourt.
  • 13 juillet : Sarko chez Pujadas, ou plutôt Pujadas sur la terrasse de Sarko, à la veille du 14 juillet : de la soupe en boîte servie par un godillot qui insulte sa carte de presse en la confondant avec celle de l'UMP.

Avec en toile de fond, le caquètement incessant des perroquets officiels qui fustigent à l'envi le déchainement de la gauche et des media contre Eric Woerth, comparant leurs méthodes à celles de la presse fasciste des années 30.

Mais ça commence à gronder dans la majorité : le sénat vote contre la réforme territoriale, les députés UMP, se souvenant brutalement qu'ils sont de droite, votre contre une nouvelle loi relative au Dialogue social dans les TPE.

 

Et ce d'autant plus que de nouvelles révélations sont publiées chaque jour par Médiapart et par les plus grands journaux ou magazines pourtant pas tous gauchisants : Le Canard Enchaîné, Libé, le Nouvel Obs mais aussi l'Express, le JDD, le Point.

 

Pour en garder une trace, et pour faire simple :

  • Un ministre du budget, qui supervise l'administration fiscale et anime en tant que trésorier du parti (jusqu'en juillet 2010) le « premier cercle » des donateurs.
  • Un ministre du budget qui serait intervenu dans le dossier fiscal de tel ou tel haut contribuable, par ailleurs membre de ce premier cercle, afin de lui éviter toute inquiétude.
  • Un ministre du budget dont l'épouse, sûrement compétente, est employée par la société de gestion de la première fortune de France.
  • Société de gestion dont le dirigeant a reçu la L Légion d'honneur de la main et sur recommandation du ministre.
  • Une première fortune de France dont on ne sait si elle a toute sa tête, qui ne connait pas trop l'étendue de son patrimoine et dont le dossier fiscal est pour le moins complexe et sujet à investigations.
  • Un ministre par ailleurs élu local qui, comme tant d'autres, a créé son micro parti afin de permettre à de généreux donateurs de soutenir et le grand parti et le petit.
  • Un ministre également maire d'une ville, haut lieu du monde turfiste, et dont l'épouse, par ailleurs dirigeant de France Galop, a fondé une écurie haut de gamme (voir article de l'Express)
  • Un ministre du budget qui vend pour une bouchée de pain à un autre dirigeant de France Galop une parcelle des domaines contenant à Compiègne un golf et un hippodrome.
  • Un procureur, proche du Président, tarde à nommer un juge d'instruction comme l'exigerait la procédure normale

C'est cela sans doute que Sarkozy appelait « la république irréprochable », et qui est devenue selon Montebourg dans Libé une « république indécente ».

 

A ce stade, les petits contrefeux de la première quinzaine de juillet ne suffisent pas. Il est temps de sortir l'artillerie lourde, de flinguer tous azimuts, de disperser « façon puzzle ». Deux malheureux faits divers viennent à point pour en fournir l'opportunité :

  • A Uriage près de Grenoble, un bandit est tué par un policier à la sortie du braquage d'un casino. S'en suivent trois nuits d'émeutes urbaines.
  • A Saint Aignan dans le Loir-et-Cher, un jeune gitan est abattu par un gendarme alors qu'il venait de forcer un barrage de la gendarmerie. S'en suit une mise à sac du village, sous les caméras de TV mais en l'absence de toute force de l'ordre.

Il n'en faut pas plus à la machine à communiquer pour se remettre en route et nous livrer un des plus beaux festivals sécuritaire qui nous fut jamais présenté en la matière.

 

Fin Juillet, changement de préfet en Isère, après qu'il ait pourtant été déclaré que le sortant avait fait du bon travail. Oui mais, « nouveau préfet » implique « cérémonie d'installation » et« cérémonie d'installation » implique « Discours d'intronisation ». Par le Président bien sûr.

D'où le funeste « Discours de Grenoble » dans lequel se succèdent coups de menton et annonces toutes plus déterminées les unes que les autres : retrait de la nationalité aux criminels d'origine étrangère, extensions des peines planchers etc.

 

L'amalgame Gens du Voyage=Gitans=Roms=Etrangers=Voyous fonctionnant à plein régime, le gouvernement s'attaque dans la foulée aux camps de roms et expulse par charters et autocars entiers.

 

La gauche, la presse (nationale et internationale), des personnalités de tous bords, des anciens premiers ministres de droite, l'ONU, l'église même, s'offusquent, s'indignent, s'étranglent, hurlent à la trahison des valeurs de la république et au viol de la constitution.

JF Khan titre « Le Voyou de la République », même Rocard se fend dans Marianne d'un « Il le paiera et il l'aura mérité ». Une seule voix ne se fait pas entendre, et son silence est
assourdissant : celle de Simone Veil.

 

Puis le président part faire du vélo autour de la maison de sa belle-mère, laissant ce navrant épisode occuper allègrement les devants de l'actualité en espérant sans doute que la réforme des retraites reprendra le dessus à la rentrée?

 

Au passage, Arlette Chabot a été débarquée de la tête de la rédaction de France 2 par le nouveau Président de France Télévisions, parce que semble-t-il elle n'était plus en odeur de sainteté à l'Elysée.

Nous sommes fin août, l'université d'été du PS met en scène un nouveau concept : l'Union ; celle de l'UMP montre un bloc majoritaire fendillé de toutes parts et ne pensant plus qu'au remaniement ministériel annoncé pour novembre.

 

Sarko est au plus bas dans les sondages, mais on ne parle plus de Karachi et les perroquets s'accordent à proclamer que l'affaire Woerth est close. Lueur d'espoir en Sarkozye ?

 

Pourtant, dès le 30 août, de nouvelles révélations viennent alourdir un peu plus le dossier d'un ministre dont les démentis appuyés nous rappellent de plus en plus ceux de ce coureur cycliste dopé « à l'insu de son plein gré ».

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